Aujourd’hui on va
parler d’un film sorti il y a déjà deux semaines. J’ai eu la chance
d’assister à l’avant première et de pouvoir rencontrer et questionner Lucas
Belvaux, le réalisateur.
Le
pitch du film est plutôt simple. Clément, jeune et brillant professeur de
philosophie, se retrouve muté à Arras, Nord Pas de Calais. En temps que bon
parisien qui se respecte, il est snob, hautain et méprisant envers la province et
ses provinciaux. Et en temps qu’intellectuel, il est snob, hautain et méprisant
en ce qui concerne la culture de divertissement. Kant vs Jennifer Aniston, pour
Clément il n’y a même pas de match. D’ailleurs, l’héroïne de Lucas Belvaux
s’appelle également Jennifer. Elle est coiffeuse, aime Anna Gavalda et les
soirées karaoké avec ses amies. Deux personnages que tout oppose donc. Pas
son genre est bien une comédie romantique, mais aussi un film qui
interroge sur la capacité d’un couple à transcender les différences sociales et
culturelles. Après tout, qu’est-ce qu’un prof de philo et une coiffeuse
pourraient bien avoir à partager ? De l’amour, du sexe, quelques moments
de bonheur ? Bien sûr certains diront que les personnages sont clichés et
que la fracture sociale et intellectuelle entre eux est appuyée avec la
délicatesse d’un troupeau d’éléphants. Mais après tout, cette fracture est le
thème du film, il fallait bien qu’elle soit montrée, de manière rapide et
évidente. De plus, il faut savoir que l’histoire originale n’est pas l’œuvre de
Belvaux mais celle de l’auteur Phillippe Vilain. Le roman éponyme dont est tiré
le film est sorti en 2011 et avait pour ambition de questionner l’importance du
milieu social dans une histoire d’amour, exactement comme tente de le faire
Belvaux dans le film. De ce point de vue l’adaptation est plutôt fidèle à
l’œuvre originale.
Le
jeu des acteurs et l’intelligence de l’écriture rendent particulièrement
intéressantes les interactions entre Jennifer et Clément. Vous l’aurez compris,
les acteurs sont une des grandes forces de ce film. En effet, Emilie Dequenne
(Jennifer) est déjà une actrice confirmée, on a notamment pu la voir dans Le Pacte des Loups de Christophe Gans.
Loïc Corbery (Clément) vient quant à lui du théâtre et est sociétaire de la
Comédie Française depuis 2005. D’ailleurs, Belvaux l’a choisi pour son aisance
avec la lecture et les textes classiques entre autres, puisque plusieurs scènes
de lecture jalonnent le film. « Il
me fallait un comédien à l’aise avec les texte classique, qui sache en faire
ressortir toute la poésie dès la première lecture » a déclaré Lucas
Belvaux lors de l’avant-première en évoquant le choix de son comédien. Deux
acteurs particulièrement bons, qui participent grandement à la qualité du film,
d'autant plus que pour Belvaux, la direction d'acteur se limite au minimum,
afin de laisser libre cours au jeu du comédien. Pourtant j’ai un avis très
arrêté sur l'importance des acteurs. Proche de la Politique des auteurs, j'estime qu'un bon film l'est avant tout
grâce à son réalisateur, l'acteur n'étant qu'un moyen d'expression pour se
dernier au même titre que le cadrage, le montage ou l'éclairage. Je
reste donc persuadé qu'un film ne peut pas être bon sans un bon réalisateur, même
avec les plus grands acteurs. Cependant il faut savoir reconnaître une
belle performance, et c'est ce que nous offrent Duquenne et Corbery.
Le
scénario est intéressant autant grâce à ce qu'il raconte que grâce à comment il
le raconte. En effet, comme les scènes de lecture, trois scènes de karaoké
découpent le film. Trois chansons qui figurent l'état d'esprit de Jennifer au
cours de l'histoire, comme une sorte d'indicateur d'humeur. La dernière scène
du film succède justement à une de ces scènes de karaoké. Cette dernière amène
à la perfection un twist final absolument génial. Mais vous n'en saurez pas
plus.
On
dira donc que Pas son genre est une très bonne surprise, une comédie
romantique vraiment originale qui propose un vrai questionnement et pas juste
une histoire hollywoodienne aseptisée. Un film qui fait plaisir à voir.
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