mercredi 16 avril 2014

Flashback : Retour sur les Oscars 2011




En écrivant ma rétro sur Aronofsky je n’ai pas pu faire l’impasse sur les Oscars 2011. Ce fameux 27 février 2011 au Kodak Theater de Los Angeles. Je dois vous avouer que je ne m’en suis toujours pas remis. J’ai eu envie de revenir un peu sur ces événements histoire de pousser un grand coup de gueule, parce que trois ans après je les ai toujours en travers de la gorge. Sachez tout d’abord que pour l’Oscar du meilleur film on avait : Black Swan (Aronofsky), Le discours d’un roi (Tom Hooper), 127 heures (Danny Boyle), The Social Network (David Fincher), True Grit (Les frères Cohen) et Inception (Christopher Nolan). Il en reste 4 autres que je laisse de côté car je connais moins les réalisateurs. Ce qu’il faut savoir sur Tom Hooper c’est que Le Discours d’un Roi n’est que son second film, le premier étant un biopic sur le court passage de Brian Clough comme entraineur à Leeds United. C’est du foot hein, championnat anglais. Enfin voilà, ce cher Tom Hooper était un illustre inconnu avant de tourner Le Discours d’un Roi. Quand on voit qu’il dame le pion à des réalisateurs au talent incontestable et incontesté tel que David Fincher, Darren Aronofsky ou Christoper Nolan, on est en droit de se demander ce qui a traversé l’esprit du jury au moment de l’attribution des récompenses. Rien ne va ! Le meilleur scénario original par exemple, entre Le Discours d’un roi, scénario historique basé sur une histoire vraie qui raconte l’amitié entre un roi et son orthophoniste, et Inception, génial intrigue se promenant littéralement dans le monde onirique et se terminant pas une fin très très perturbante qui interroge et dérange, il est facile de choisir. Enfin c’est quand même incroyable, depuis Memento on sait que Christopher Nolan a un don hors du commun pour écrire et raconter des histoires au travers de ses films. Pourquoi remettre le prix du meilleur scénario original à une histoire somme toute lambda : un looser qui devient un héros et on clôt tout ça par un bon gros happy end, il y en a juste des tonnes au cinéma ! Rien de novateur ou d’original ! Tenez, on peut citer Hercule de Disney, Full of it (même s’il est moins connu), Kick ass… parce qu’un personnage un peu looser auquel on peut s’identifier qui se transcende et devient un héros qu’on peut admirer, c’est une des plus vieilles recettes de  l’Histoire du cinéma ! Donc voilà, déjà là je trouve qu’il y a un énorme problème. Pas un seul Oscar technique (photographie, montage, montage son, mixage son et effets visuels) n’a été remis à Black Swan ! Lisez ma critique vous comprendrez ce que j’en pense ! Heureusement, Inception remporte autant de prix que Le Discours d’un Roi (quatre au total), et The Social Network de David Fincher finit quant à lui avec 3 récompenses. Mais le sentiment qui prédomine est la déception. La déception qu’un film tel que Black Swan, tout autant plébiscité par la critique et le public que Le Discours d’un Roi, ait été boudé par le jury des Oscars. 
Un film exceptionnel qui n’a été nommé que 5 fois (12 pour Le Discours d’un Roi) et qui n’a récolté qu’un Oscars, celui de meilleure actrice décerné à Nathalie Portman. Un Oscars totalement mérité mais qui aurait dû être accompagné d’autres prix, ce qui ne fut pas le cas… Voilà il fallait que ça sorte ! Ouf ça fait du bien. Et c’est depuis ce jour-là que je ne fais plus confiance au jugement des festivals.

mardi 15 avril 2014

Rétro Darren Aronofsky #4 Le Lion d'Or et après...

Nous voici à la fin de cette série consacrée à Darren Aronofsky. Quatre articles pour résumer une carrière qui dure depuis déjà 16 ans et 6 long-métrages (depuis la sortie de Noé). Une carrière au cours de laquelle le réalisateur américain s’est distingué comme un grand talent du cinéma contemporain. Pour s’en persuader il suffit de regarder la note moyenne qu’il obtient sur Allociné (France) et sur Rotten Tomatoes (USA) : 3,76/5 pour la France et 80,2% de critique positive sur le site américain. Des résultats impressionnants qui résultent selon moi de sa capacité à rassembler critiques et spectateurs lambda. Oui, si je devais résumer Darren Aronofsky, je dirais qu’il rend le grand cinéma accessible au grand public. Certains trouvent que cela rend ses films emphatiques et prétentieux. Je leur dirais simplement qu’en effet, parfois, Aronofsky force le trait, mais d’un autre côté cela permet à un public non averti de profiter quand même de toute l’ampleur du film. Nous ne sommes pas dans un certain snobisme cinéphile qui peut toucher parfois le cinéma d’auteur. Ce que je veux dire c’est que ce n’est pas parce qu’un film est long, chiant et signé par un pote des Cahiers du cinéma (3) que c’est forcément un bon film ! Attention je ne dis pas pour autant qu’il faut dédaigner le film d’auteur. Il y a un juste milieu à trouver entre commercial et artistique et je trouve que cet équilibre ressort particulièrement bien dans le cinéma d’Aronofsky. Enfin, comme je vous le disais au début je ne suis pas très objectif, mais en même temps, est-ce que c’était vraiment le but de cette série ?

Enfin bon, aujourd’hui on s’intéresse à la période la plus récente de la carrière de Darren Aronofsky qu’on pourrait appeler la période Lion d’or. Après l’accueil mitigé reçu par The Fountain à sa sortie,


C’est le seul film de Darren Aronofsky pour lequel Matthew Libatique ne dirige pas la photographie. Aronofsky a d'ailleurs déclaré qu'il avait "fait appel à la directrice de la photo Maryse Alberti qui a collaboré à beaucoup de documentaires." Ainsi il a obtenu le ton beaucoup plus réaliste et naturel qu'il recherchait sur The Wrestler. Un style visuel très en vogue à Hollywood et qui se retrouve notamment sur The Place Beyound the Pines – que j'ai déjà chroniqué – sur 8 Mile ou encore sur Fighter. Et ces trois films ont tous en commun avec The Wrestler de dépeindre la vie dans les ghettos blancs au USA, l'Amérique White trash si vous préférez. Et donc le travail de Maryse "La documentariste" Alberti se ressent sur le projet par un éclairage beaucoup plus naturel que celui de Libatique et par l'utilisation récurrente de la caméra à l'épaule, eh ouais on n’a pas forcément de steadicam sur un documentaire.
Et il en va de même pour la bande son qui se compose de nombreux morceaux qui ne sont pas signés Clint Mansell bien que ce dernier soit crédité au générique en temps que compositeur du film. Le thème principal de la bande-annonce, qui est aussi la chanson du générique de fin, a été composée et interprétée par Bruce Springsteen. Enfin voilà, on se rend bien compte que sur ce film, Aronofsky a envie de faire autre chose, quelque chose de vraiment différent que la pléthore d'effets de style qu'on lui connaît habituellement. Ça a moyennement plu à certains, dont moi, mais globalement c'est une démarche qui a séduit la presse et le public au point qu'Aronofsky se verra remettre le lion d'or (prix récompensant le meilleur film en compétition) à la Mostra de Venise en 2008. Le président du jury Wim Wenders a même précisé que Mickey Rourke aurait remporté le prix du meilleur acteur si le règlement du festival n'avait pas stipulé qu'un film ne pouvait être récompensé deux fois. Mais ce n'était que partie remise puisque quelques mois plus tard, Mickey Rourke obtenait le Golden Globe du meilleur acteur dans un film dramatique. Il remporte aussi le prix de meilleur acteur aux BAFTA. Il passe malheureusement à côté de l'Oscar qui est, en cette année 2009, attribué à Sean Penn pour son interprétation du politicien gay Harvey Milk.
The Wrestler marque donc la consécration de Darren Aronofsky autant que la renaissance de Mickey Rourke après une longue traversée du désert. Par la suite Darren Aronofsky est sollicité pour réaliser un remake de Robocop, mais le projet est finalement abandonné par la MGM pour des raisons financières. Suite au succès de The Wrestler, Aronofsky ne perd pas de temps et embraie directement avec le tournage de Black Swan, un thriller psychologique sur une danseuse de ballet. C’est le retour de Matthew Libatique à la photo et ça se ressent vraiment. On n’est pas loin de l’éclairage très appuyé qu’on avait sur The Fountain même si ici, le film parrait tout de même plus naturel. Sur ce film Atronofsky s’est offert les services de Benjamin Millepied, chorégraphe et danseur français qui prendra en octobre prochain la tête du ballet de l’opéra de Paris, rien que ça. Et c’est David Stein qui tenait le poste de directeur artistique. Rien de bien notable au sujet de ce dernier, si ce n’est qu’avant Black Swan il avait travaillé sur Eternal Sunshine of the Spotless Mind et qu’après Black Swan, il a officié sur 12 Years a Slave. Mais revenons-en au film. Si vous ne l’avez pas vu et que vous ne connaissez pas non plus Le Lac des cygnes sachez qu’il s’agit d’un grand classique du ballet dont la musique a été écrite par Tchaïkovski et qui a été créé (joué pour la première fois) par la troupe du ballet du Bolchoïl. C’est l’histoire d’une jeune femme transformée en cygne par un sorcier et que seul l’amour peut libérer de ce maléfice. Un prince tombe amoureux d’elle mais sa jumelle maléfique, le cygne noir, prend sa place à l’insu du prince. Il existe ensuite plusieurs fins mais dans celle présentée dans le film, la jeune fille, ivre de désespoir, se suicide en se jetant dans le lac. Je vous raconte tout ça parce que dans le film, tout tourne autour de cette histoire. En effet, l’histoire de la danseuse, Nina, n’est autre qu’une mise en abyme du Lac des cygnes. Il y a Nina, le cygne blanc, Lili, le cygne noir et Thomas, le beau prince. Et pour se transcender et sortir de sa condition de simple danseuse du corps de ballet, elle doit gagner l’amour de Thomas et devancer sa rivale, Lili. Certains diront que cette mise en abyme est trop évidente. Je dirais plutôt qu’elle est mise à la portée du grand public comme toujours chez Aronofsky. Le scénario est d’une rare intelligence et permet au spectateur de se sentir lui-même intelligent. Cette qualité d’écriture a été un peu boudé par les grands festivals mais a remporté de nombreux prix même si ceux-ci sont moins prestigieux que les Oscars ou les Golden Globes.
Cette qualité du scénario s’accompagne d’une véritable virtuosité du cadrage et des mouvements de caméra dont fait preuve Aronofsky. La première scène en est un parfait exemple. On y voit Nathalie Portman (Nina) sur scène, en train de danser avec un homme. La caméra tourne autour des deux personnages en sens inverse donnant une impression de vitesse et une grande fluidité au mouvement. Le cadre nous dévoile tour à tour le bas et le haut du corps de la danseuse laissant ainsi apparaître toute la beauté et la magie d’un art parfois un peu trop imperméable aux non-danseurs. La caméra virevolte dansant littéralement avec les danseurs (c’est bien stable et bien fluide steadicam sans aucun doute), bref dès le premier plan Aronofsky annonce la couleur, on est dans un film de danse, on va y voir de la danse même avec la caméra. Tout au long du film sont distillés de petits effets sonores qui nous rappellent le côté fantastique de ce thriller. L’éclairage est théâtral, les costumes marquent d’emblée les rôles des personnages (pendant presque tout le film Nathalie Portman est en blanc et Mila Kunis en noir). Vous l’aurez compris, c’est exceptionnel de maitrise, de créativité de virtuosité… Et la critique ne s’y est pas trompée. L'IMDB lui accorde la note de 8/10. Et sur Allociné la presse donne au film un très bon 4,1/10. La presse a surtout salué la performance de Nathalie Portman. Certes elle est excellente mais, pour moi, le film repose essentiellement sur le talent d'Aronofsky.
Voilà on arrive au bout de notre voyage à travers la carrière de l'un des meilleurs réalisateurs en exercice, j'espère qu'il vous aura été agréable. Mais je vous reparlerai d'Aronofsky très prochainement avec une critique de Noé.


lundi 7 avril 2014

L'épouvantable vendredi du 28 mars


La semaine dernière je vous parlais du torture porn, sous genre du cinéma d'horreur et du cinéma d'exploitation, auquel était consacré le dernier Épouvantable vendredi de l'Institut Lumière. Aujourd'hui je reviens sur la soirée elle-même. Pour vous donner un petit aperçu de ce que donne une soirée organisée par des fans d'hémoglobine, de monstres, de fantômes et de tueurs psychopathes.

Nous voilà donc vendredi 28 mars devant le hangar du premier film, la salle de projection de l'Institut Lumière. Tout semble normal lorsqu'on passe au guichet pour prendre sa place. On pénètre ensuite dans un autre monde, fait de référence aux films qui sont présentés. Cette fois c'était mise en scène de séance de torture à l'entracte organisée par les petit gars d'AOA Production également connus pour l'organisation de la Zombie Walk à Lyon. Malheureusement je n'ai pas de photo de cette petite animation. Mais pour vous donner une idée voici celles de la soirée précédente consacrée à Alexandre Aja.

Ambiance lumières baissées et écran de fumée juste avant de rentrer dans la salle. Comme vous pouvez le constater c'est glauque à souhait et ça met carrément dans l'ambiance. Nous sommes fin prêts pour entrer dans la salle et en prendre plein la vue.
Je suis calé dans un fauteuil, Fabrice Calzettoni arrive pour nous présenter le programme de la soirée. Outre Hostel et Hostel 2 qui sont les films choisis pour représenter le torture porn, on a eu droit à la bande-annonce des  prochaines Hallucinations collectives (du 16 au 21 avril, on y sera), une visite filmée du musée des tortures de Toscane et des extraits du making-of d'Hostel où Eli Roth parle de son travail sur le film. On y apprend notamment que le film est basé sur de véritables pratiques mafieuses d'Europe de l'est, à savoir le trafic d'êtres humains destinés à être torturés assassinés. Il fait bon vivre en Slovaquie !
Avant de commencer le film, Calzettoni nous félicite d'être venus en nous désignant comme les purs et durs de l'Epouvantable vendredi, nous les courageux qui sommes motivés pour assister à près de trois heures de tortures toutes plus extrêmes les unes que les autres. Je me retourne pour voir qui sont les autres "purs et durs" et là surprise, jeunes, vieux, hommes, femmes… Bref, un public très hétérogène bien que peu nombreux. Définitivement, Alexandre Aja attire plus qu'Eli Roth.

Enfin bref une bien bonne soirée que cet avant denier Epouvantable vendredi. La dernière aura lieu le 6 juin et aura pour thème les animaux géants. Au programme: Les dents de la mer et Anaconda. Pour ceux qui aiment les films d'horreur et qui n'ont pas encore eu l'occasion de découvrir ces soirées de l'Institut Lumière, n'ayez crainte, l'Epouvantable vendredi ce n'est pas fini. Ca reprendra l'an prochain avec une nouvelle formule: un film par mois au lieu de deux tous les deux mois. Vous trouverez toutes les infos sur facebook.







dimanche 6 avril 2014

Rétro Darren Aronofsky #3 The Fountain

Dans quelques jours sort un film que j’attends depuis près de deux ans. C’est bien simple, pour moi c’est tout simplement le film de l’année. Un péplum biblique pour lequel la Paramount a déboursé 125 millions de dollars. Là normalement, si vous ne vivez pas dans une grotte vous devez voir de quel film je parle. Pour les autres il s’agit de Noé de Darren Aronofsky. Tout simplement mon réalisateur préféré. Pour ceux qui ne voient pas qui c’est, je vous donne quatre mots pour trouver : Requiem, For, A, Dream. Là en principe c’est bon, tout le monde situe. Petit focus sur le parcours d’un réalisateur dont le succès n’a d’égal que le talent.

Nous nous en étions arrêtés à Requiem for a dream. Ensuite c’est 6 ans de pause. Un repos bien mérité après le chef d’œuvre que fut son film précédent. Bon, Aronofsky n’a pas totalement délaissé le cinéma pendant cette période puisqu’il a été le scénarise et le producteur d’Abîmes sorti en 2002. Un projet qui était au départ le sien mais qu’il a abandonné après la phase d’écriture pour se consacrer à Requiem, moi je dis qu’il a eu raison. Il est également à noter que le scénario d’Abîmes résulte de la passion d’Aronofsky pour les sous-marins - personne n’est parfait, j’ai même connu un mec passionné par les tracteurs, mais je m’égare là - et de son envie de réaliser un huit-clos psychologique . Tout ça pour dire que même s’il n’est pas passé derrière la caméra pendant 6 ans, le nom de Darren Aronofsky est tout de même apparu sur les écrans entre 2000 et 2006. 2006 c’est la date de sortie du film qui nous intéresse aujourd’hui. Il s’agit donc de The Fountain. Un ami m’a demandé de faire un article entier sur ce film alors que je me posais encore la question du découpage le plus logique pour parler de la carrière de Darren Aronofsky. Au départ j’étais sceptique. Bien que j’aie adoré The Fountain, valait-il vraiment que je lui consacre un article entier ? Et puis en regardant de plus près, il est vrai que ce troisième film mérite qu’on s’y attarde. Au-delà du film en lui-même, dont nous parlerons plus tard, The Fountain constitue une sorte de trou d'air, un film à part dans la carrière d'Aronofsky. Quand on regarde ses notes sur Allociné, on constate que le « pire » film d’Aronofsky n’est autre que The Fountain et pas d’un dixième de point ! Aucune de ses réalisations n’obtient une note inférieure à 3,5 – même à 4 si on enlève Pi qui est un premier film et qui est bien moins grand public que les suivants – mis à part The Fountain qui n’obtient « que » 2,6/5, un point derrière Pi. Une chute impressionnante pour un réalisateur jusque là encensé par la critique. Côté spectateur la différence est bien moins grande – 3,3 pour The Fountain et 3,4 pour Pi – mais le film reste le moins apprécié de la filmographie du réalisateur américain. Vous devez vous demander « Bah pourquoi est-ce que tu nous en parles dans ce cas ?! » Eh bien en réalité, je suis en profond désaccord avec les spectateurs et en très profond désaccord avec les critiques. Pour moi il s'agit tout simplement du meilleur film d’Aronofsky derrière Requiem for a dream.

Le film relate le combat d'un homme qui, dans trois histoires se passant à des époques différentes, se bat contre la mort pour sauver la femme qu'il aime. Une première histoire se déroule dans le passé et relate le combat d'un conquistador contre l'inquisition espagnole, une autre se passe au présent et nous raconte les efforts d'un chercheur pour trouver un remède contre le cancer, la troisième se déroule quant à elle dans une sorte de futur onirique et relate la montée d'un homme et d'un arbre vers la nébuleuse mourante Shibalba qui symbolise l'au-delà dans la mythologie Maya. Il va falloir s'accrocher cher lecteur. Nous allons passer sans cesse d'une histoire à une autre pour se rendre compte des liens qui les unissent puisqu'il s'agit du principal intérêt du film.
Passé
Présent
Futur
La mise en scène est juste exceptionnelle. Je veux parler des raccords, comme au tout début du film lorsque les motifs de la salle du trône vus en plongée deviennent une croix sur un autel par un fondu enchainé. Je veux aussi parler de l'ambiance visuelle, un doré crépusculaire qu'on retrouve tout au long du film et qui donne à ce dernier une homogénéité visuelle qui relie parfaitement les trois histoires. On retrouve cette lumière à Shibalba, dans le laboratoire de Tom ou encore à la cour d'Espagne. Il y a enfin des plans qui sont repris et déclinés dans plusieurs tableaux. Comme celui où la caméra suit la voiture de Tom, d'abord à l'envers puis à l'endroit en se retournant. Un plan qui est repris à l'identique avec le conquistador sur son cheval. Il y a aussi les très gros plans sur les poils de l'arbre qui frémissent lorsque Hugh Jackman s'en approche et qui, dans l'histoire au présent, deviennent les cheveux d'Izzi. Autant d'éléments qui créent des liens de mise en scène évidents entre les trois tableaux et qui signifient bien aux spectateurs que les trois histoires sont liées. Il y a d'ailleurs plusieurs manières d'interpréter ces trois récits. En effet, il s'agit d'une même histoire déclinée à trois époques différentes, mais il existe également d'autres liens scénaristiques entre elles. On peut considérer que l'histoire principale est celle qui se déroule au présent, la quête du conquistador en découle puisqu'il s'agit du livre écrit par Izzi, et on peut enfin interpréter la montée vers Shibalba comme le voyage intérieur qu'accomplit Tom vers l'acceptation de la mort de sa femme. Plusieurs niveaux de lecture qui sont rendus possibles par l'intelligence du scénario. En allant encore plus loin, on se rend compte que l'histoire d'amour entre Izzi et Tom et le combat de celui-ci pour la sauver ne sont que des prétextes pour questionner notre rapport à la mort. A la fin, lorsque Tom accepte de laisser Izzi s'en aller et de finir son livre, le personnage du futur abdique et accepte de mourir pour pouvoir enfin retrouver celle qui l'aime. Ainsi, Aronofsky décrit la mort non pas comme une fin mais comme un passage, un état transitoire vers autre chose. The Fountain est une véritable expérience cinématographique tant par son scénario que par sa mise en scène. Un film exceptionnel qu'il faut visionner plusieurs fois pour en saisir toutes les subtilités. Il y a par exemple les tatouages que se fait le personnage du futur, ce sont des cercles qu'il a dessinés au fil du temps et qui peuvent s'apparenter au cercle de croissance d'un arbre. Et je pourrais continuer pendant longtemps tant les symboles et les images cachés sont nombreux.
Le dernier point que je dois aborder est la musique, une nouvelle fois composée par Clint Mansell. Elle donne au film une ampleur supplémentaire tant elle épouse à la perfection les images d'Aronofsky. Il suffit de regarder les prix et les nominations du film dans les festivals. Outre sa nomination au Golden Globes, la musique de Clint Mansell est à l'origine de 4 des 6 prix remportés par le film.

Pour résumer, je dirais que The Fountain est un moment de grâce dans la carrière d'Aronofsky. Un film extraordinaire à de nombreux point de vue qui a cependant beaucoup divisé. Les commentaires suscités par le film ne font d'ailleurs pas dans la demi-mesure, pour certains critiques il s'agit "d'une des œuvres les plus fascinantes à avoir foulé les salles depuis très longtemps" alors que pour d'autres c'est un "film illuminé se perdant dans les volutes fumeuses d'un scénario alambiqué et prétentieux." Bref, The Fountain ne laisse pas indifférent et c'est peut-être bien cela la raison d'être du cinéma…

jeudi 3 avril 2014

Rétro Darren Aronofsky #2 Requiem for a dream


Dans quelques jours sort un film que j’attends depuis près de deux ans. C’est bien simple, pour moi c’est tout simplement le film de l’année. Un péplum biblique pour lequel la Paramount a déboursé 125 millions de dollars. Là normalement, si vous ne vivez pas dans une grotte vous devez voir de quel film je parle. Pour les autres il s’agit de Noé de Darren Aronofsky. Tout simplement mon réalisateur préféré. Pour ceux qui ne voient pas qui c’est, je vous donne quatre mots pour trouver : Requiem, For, A, Dream. Là en principe c’est bon, tout le monde situe. Petit focus sur le parcours d’un réalisateur dont le succès n’a d’égal que le talent.

Après le franc succès de Pi, Aronofsky se lance sur son deuxième projet. Le grand, l’immense Requiem for a dream. Selon moi, il s’agit tout simplement de l’un des tout meilleurs films de l’histoire du cinéma. La mise en scène est exceptionnelle, le montage est très clipé, l’image très travaillée et que dire de la musique, si ce n’est que c’est l’une des bandes originales les plus connues du cinéma moderne. Je pourrais consacrer des pages et des pages à ce film. Un film qui a fondamentalement changé ma vision du cinéma et même de l’art en général. On notera donc que ce film a révélé au grand public, non seulement le talent de Darren mais aussi celui de son compositeur et ami Clint Mansell. On retrouve d’ailleurs ce dernier sur tous les films d’Aronofsky. Notons également que sur les cinq prix qu’a pour l’instant remportés Mansell, quatre l’ont été sur des films de Darren Aronofsky. Une fusion artistique qui atteint la quasi perfection sur Requiem for a dream et sur The Fountain. Requiem for a dream est un film d’une telle intensité et d’un tel réalisme qu’il est aujourd’hui visionné en faculté de psychologie pour étudier les comportements de toxicomanes. Il est également projeté dans les écoles afin de sensibiliser les jeunes aux problématiques sociales de la drogue. Le film est un succès planétaire et totalise plus de 3,6 millions d’entrées. Et le succès critiques est encore une fois au rendez-vous. Récompenses et nominations pleuvent notamment pour Elen Burstyn et son interprétation de Sarah Goldfarb. Et ça n’a rien d’étonnant. Elen Burstyn ce n’est pas n’importe qui. Avant Requiem for a dream en 2000, on avait déjà pu la voir dans de nombreux film et notamment dans le très célèbre L’exorciste de William Friedkin en 1973. Sur Requiem, la belle Jennifer Connelly - qu’on retrouve sur Noé – interprète la belle Marianne, petite amis d’Harry lui-même le fils de Sarah. Quant au héros, Harry Goldfarb, il est campé pas Jared Leto qui n’est pas n’importe qui lui non plus puisqu’à l’époque il a déjà travaillé avec David Fincher sur Fight Club ou encore Terrence Malick dans La ligne rouge. Il ne me reste juste qu’un quatrième personnage à vous présenter et le tableau sera pratiquement complet. Il s’agit de Tyrone, le pote d’Harry, grand black plutôt cool, c’est probablement le personnage qui s’en sort le mi… euh, le moins mal. Parce que, pour ceux qui n’ont pas vu le film (j’espère que tu l’as vu, si ce n’est pas le cas, il faut remédier à ça au plus vite !) Requiem for a dream dépeint la lente et douloureuse descente aux enfers de ces quatre personnages : Harry, sa mère Sarah, son pote Tyrone et sa petite amie Marianne. Un enfer qui atteint son paroxysme au cours des 10 dernières minutes. Une monstruosité ! Aronofsky passe d’un personnage à l’autre très rapidement. Il nous assène des images de plus en plus dures en montage alterné.
Une mise en scène qui finit par donner des hauts le cœur et qui se clôt sur un terrible sentiment de malaise pour le spectateur. Ce sont 10 minutes de pur cinéma. Lors de mon premier visionnage du film, je ne pouvais même pas imaginer qu’une œuvre d’art puisse me faire ressentir une telle chose. J’ai eu 20 bonnes minutes de nausées. Depuis ce jour là je vois la création artistique d’une façon nouvelle. L’ambiance du film est extraordinaire, la musique se marie parfaitement avec l’image. L’image, je ne m’y suis pas vraiment arrêté d’ailleurs. Comme on l’a vu avec les acteurs, Aronofsky ne s’entoure pas de n’importe qui. Il en va de même pour la photographie. En effet depuis Pi, le directeur photo de Darren est Matthew Libatique qui a travaillé sur Iron Man, Iron Man 2, mais surtout sur Le nombre 23, un film à l’ambiance très particulière qui nécessitait un vrai travail d’éclairage, d’étalonnage et de cadrage. Bref, sur Requiem for a dream, Mansell, Libatique et Aronofsky arrivent à maturité et ça fait mal, très, très, très mal…

mercredi 2 avril 2014

Rétro Darren Aronofsky #1


Dans quelques jours sort un film que j’attends depuis près de deux ans. C’est bien simple, pour moi c’est tout simplement le film de l’année. Un péplum biblique pour lequel la Paramount a déboursé 125 millions de dollars. Là normalement, si vous ne vivez pas dans une grotte vous devez voir de quel film je parle. Pour les autres il s’agit de Noé de Darren Aronofsky. Tout simplement mon réalisateur préféré. Pour ceux qui ne voient pas qui c’est, je vous donne quatre mots pour trouver : Requiem, For, A, Dream. Là en principe c’est bon, tout le monde situe. Petit focus sur le parcours d’un réalisateur dont le succès n’a d’égal que le talent.

Vous vous en doutez bien, cet article ne sera pas très objectif. Non, le but pour moi est d’essayer de vous transmettre l’intérêt prononcé (euphémisme) que je porte à l’œuvre et au parcours de Darren Aronofsky.
Commençons par les banalités. Il naît à Brooklyn (New York) en 1969. Il est réalisateur, scénariste et producteur. Il se forme aux techniques de réalisation et d’animation à Harvard. En 1991, il tourne son premier film, un court-métrage qui sera son film de fin d’étude : Supermarket Sweep. Il tourne ce film avec l’acteur Sean Gullette rencontré à Harvard et qui tiendra le premier rôle dans le premier long-métrage d’Aronofsky, Pi. Nous somme donc au début des années 90 et Darren Aronofsky quitte l’université pour se lancer dans une carrière de cinéaste. L’étape suivante c’est donc Pi, un thriller psychologique contant l’histoire de Max, un brillant mathématicien sur le point de faire la plus grande découverte de sa vie : décoder la formule numérique qui se cache derrière le marché des changes. Un premier film remarquable sur plusieurs plans. Tout d’abord il faut savoir que le film n’a couté que 60 000 dollars, une somme ridiculement faible dans le milieu du cinéma (pour mémoire Avatar a coûté plus de 300 millions de dollars). Aronofsky et Gullette ont fait du porte à porte, empruntant quelques centaines de dollars à chaque fois jusqu’à réunir en 1996, la somme nécessaire à la mise en route du film. Ensuite, le parti pris esthétique du film. Aronofsky fait le choix du noir et blanc pour figurer la descente aux enfers d’un génie.

On peut d’ores et déjà faire un lien avec la suite de la carrière du réalisateur en remarquant que la descente aux enfers de ses personnages est un thème récurrent dans son œuvre. Si on résume, Pi est un premier film, autoproduit et tourné en noir et blanc. Il est présenté pour la première fois en janvier 1998 au festival de Sundance, l’un des principaux festivals de film indépendant au monde où Aronofsky remporte le prix du meilleur réalisateur pour un film dramatique. La même année, il est nommé à Deauville pour le Grand Prix. Aux Etats-Unis, la sortie commerciale du film a lieu quelques mois plus tard, en juillet. Au 29 novembre 1998, la petite production indépendante à 60 000 $ avait déjà rapporté plus de 3 200 000 $. Même si Aronofsky n’est pas encore le réalisateur à succès qu’il deviendra, ce premier film constitue une base solide pour sa carrière. Pi est un succès public et critique, un vrai succès d’estime qui propulse le jeune réalisateur de 29 ans au rang d’artiste reconnu. Mais les choses ne vont pas s’arrêter là…