vendredi 14 novembre 2014

[REC] 4 Apocalypse : Voilà, c’est fini

Hola moussaillons ! Bienvenue à bord pour ce quatrième et dernier volet de la saga [REC]. Je dois bien avouer qu’après [REC] 3 Génesis, je n’attendais pas grand-chose de cette saga qui avait pourtant magistralement débuté. En effet, en 2007, c’est une véritable bombe qui s’est abattue sur le cinéma d’horreur : [REC], le renouveau du found footage, 8 ans après Le projet Blair Witch. Le succès du premier opus appelait forcément une suite, c’est comme ça dans le cinéma de genre, quand un concept marche, on le rentabilise à fond. Malheureusement, les choses n’ont pas été en s’améliorant. [REC]² a définitivement fait basculé la saga dans le mysticisme religieux et la possession et [REC] 3 Génesis… Bah en fait je sais pas trop quoi en dire, si ce n’est que c’était un ratage quasi-total, symptomatique d’une saga en perte de vitesse. Ce n’est pas pour lui jeter la pierre, mais le seul responsable fut Paco Plaza, qui s’est retrouvé seul aux manettes du troisième opus. Après avoir collaboré sur les deux premiers épisodes, le duo Paco Plaza/Jaume Balaguero s’est séparé pour la fin de la quadrilogie.
C’est donc Balaguero seul qui a réalisé [REC] 4 Apocalypse. Une bonne chose en soit puisque sa volonté était de retourner à une horreur plus premier degré, plus brutale, en oubliant la dimension humoristique que Plaza avait apporté au troisième volet.
On se retrouve donc à bord d’un bateau, quelques jours après la fin des épisodes 2 et 3. On y retrouve Angéla Vidal, notre reporter préférée qui avait mal tourné à la fin du deuxième épisode. Il y a également deux militaires qui ont sorti Angela de l’immeuble au début de cet épisode 4 et une vieille femme qui était au mariage de l’épisode 3. Ils sont donc tous coincés en pleine mer avec une équipe de médecins menant des expériences dans le plus grand secret, enfin des médecins de film d’horreur quoi.
Tout comme dans le 3, le found footage, qui avait fait le succès du premier épisode, est abandonné. Les images des caméras de surveillance du bateau sont plus un clin d’œil qu’un véritable élément de mise en scène. C’est un premier bon point pour ce [REC] 4 par rapport à Génesis qui mélangeait tout en présentant une première partie en « caméra amateur » et une seconde en format cinéma classique. Un grand n’importe quoi qu’on nous épargne dans [REC] 4. L’histoire reprend donc après le 2 et le 3 qui se déroulaient à peu près en même temps. Tous les survivants ayant été en contact avec des possédés ont été mis en quarantaine sur le bateau et comme on pouvait s’y attendre tout part en c***. La première partie du film permet de replacer l'histoire dans son contexte. Bien qu'un peu longue, elle est nécessaire à la cohérence de ce quatrième épisode. 
Finalement un singe zombie attaque le cuisinier du bateau et le mord. Ce dernier cuit l’animal à la poêle et le sert ensuite au reste de l’équipage. Je sais pas pour vous mais moi ça me parait pas être la meilleure idée du monde. Et en effet, quelques minutes plus tard, le bateau est envahi par des zombies possédés en pleine digestion de leur ragout de singe contaminé. Alors comme je le raconte ça à l’air un peu ridicule et en fait c’est parce que ça l’est un peu. Les singes zombies c’est légèrement too much. Mis à part ça, le film est pas mal et nous propose même quelques savoureux moments comme quand les médecins tentent d’opérer Angela sur la table de la cuisine (à vif bien sûr, sinon c‘est pas marrant) ou alors quand un des militaires trouve un moteur de bateau et s’en sert comme d’une… bah comme d’un mixeur à zombies en fait. Il y a du sang, de l’arrachage de carotide, du défonçage de tête à l’extincteur et tout ça dans la joie et la bonne humeur. Le principal point noir dans la mise en scène de Balaguero, c’est l’aspect brouillon des scènes d’attaque de zombies. Alors bien sûr dans ce genre de film ça bouge dans tous les sens et on voit pas grand-chose, mais là, c’est particulièrement désagréable à regarder. Quand c’est un found footage, ça fait partie du délire mais là ça rend les scènes d’action un peu difficile à suivre.
Au final, ce dernier épisode clôt plutôt bien la série, mais laisse tout de même la porte ouverte à une éventuelle suite, au cas où Filmax ait besoin d’argent. C’est bien connu, dans le cinéma d’horreur, une saga n’est jamais vraiment finie…

dimanche 9 novembre 2014

Paradise Lost : Une histoire intéressante


Au début des années 90, c'est la fin de l'empire de Pablo Escobar. Au même moment, Nick, un jeune canadien, débarque en Colombie pour ouvrir une école de surf. Il y tombe follement amoureux de la nièce du célèbre baron de la drogue. Une situation qui pourrait vite tourner à son désavantage…

Intéressant. Je dirais que c'est le mot qui qualifie le mieux le premier film d'Andrea Di Stefano. Entre biopic et fiction, l'acteur et dorénavant réalisateur italien a su trouver un équilibre intéressant. En effet, l'histoire de Nick est inspirée de celle d'un homme à qui Escobar avait donné pour mission de cacher son trésor. Une histoire ou une légende que Di Stefano a apprise d'un de ses amis qui était policier. C'est donc autour de deux personnages que se développe le scénario, et non pas uniquement autour d'Escobar. D'un côté un inconnu au destin tragique et de l'autre l'une des plus imposantes légendes criminelles de tous les temps, Pablo Escobar. C'est ce décalage qui assoit le film comme un thriller et qui rend l'intrigue de ce dernier, efficace. Ce côté David contre Goliath rend l'histoire d'autant plus intéressante que nous somme par défaut, dans le camp de Nick. Il est attachant et forme un très joli couple avec la belle Maria, mais par-dessus tout, il n'a aucune chance face à la puissance d'Escobar, ce qui renforce l'empathie du public à son égard.
Le film ne serait pas du tout le même sans la prestation de Benicio Del Toro. L'acteur portoricain a su entrer avec brio dans la peau du célébrissime baron colombien de la drogue. On découvre ainsi un Escobar tout-puissant et uniquement motivé par son propre intérêt, ce qui était probablement une réalité. Mais par moment, apparait une pointe d'humanité, notamment lorsqu'il s'agit de sa nièce, Maria ou du reste de sa famille proche.
Mais c'est le déroulement du film qui le rend le plus intéressant. En effet, grâce à un montage en boucle assez bien trouvé, Di Stephano nous dévoile dès le début du film ce qui sera son dernier acte. L'intérêt n'est donc plus ce qui va se passer mais plutôt comment Nick en est arrivé là. La première partie du film raconte donc comment Nick est tombé sous l'emprise d'Escobar à cause de son amour pour Maria, quant à la deuxième, celle qui se déroule après le montage en boucle, je ne vous en dirai rien car c'est là que réside le vrai thriller.

Au final Di Stefano nous présente un long-métrage intelligemment construit autour de deux personnalités fondamentalement opposées. Un film qui nous tient en haleine pendant presque deux heures grâce à un mélange assez bien dosé de fiction et de réalité. Au-delà de ces quelques points intéressants, "Paradise Lost" n'est rien de plus qu'un film divertissant. On passe un bon moment, mais pas de quoi crier au chef-d'œuvre.

vendredi 7 novembre 2014

INTERSTELLAR : Pas le meilleur Nolan

Sortie de salle après « Interstellar », le tout dernier film du grand Christopher Nolan. Alors ce film a beaucoup fait parler et pour cause, il marque le retour de Christopher Nolan, deux ans après l’énorme succès de « The Dark Knight Rises ». Autant dire que le britannique était attendu au tournant par des spectateurs et des critiques prêts à le porter en triomphe ou à l’enfoncer six pieds sous terre. Donc voilà, « Interstellar » qu’on aime ou qu’on n’aime pas, on ne peut pas rester indifférent.

J’ai déjà connu ce genre de sortie. On attend, on attend pendant des semaines, pendant des mois et le jour du fameux mercredi, on est la devant la salle, prêt à découvrir ce que nous a concocté ce réalisateur qu’on tient en si haute estime. Seulement voilà, des fois le résultat n’est pas du tout à la hauteur de nos attentes (cliquez-ici si vous ne voyez pas de quoi je parle). Ce sont des choses qui arrivent, il faut en avoir conscience. Même les plus grands peuvent passer à côté d’un film.

Je rentre donc dans la salle et m’installe. A ce moment-là, j’en suis au point zéro. Je n’ai rien lu sur le film et je ne suis même pas sûr d’avoir vu la bande annonce une fois en entier. Comme souvent je viens là en candide pour avoir le plaisir de découvrir un film. Aucun a priori, aucune attente particulière : le meilleur moyen de demeurer objectif.

Pour ce qui est du pitch, Interstellar c’est l’histoire d’un ancien pilote de la NASA nommé Cooper qui tente d’élever sa fille Murph et son fils Tom après la mort de leur mère. Mais le monde est en perdition et la catastrophe ne peut plus être évitée, à moins qu’un nouveau monde soit trouvé sur une autre planète. Tel est le but de la mission Lazare pour laquelle Cooper est recruté. Il va donc quitter la Terre et ses enfants pour tenter de les sauver.

Alors oui, Nolan avait annoncé au Comic Con de Las Vegas qu’Interstellar s’écarterait de ses précédentes productions, et se rapprocherait des films de science-fiction ayant bercé son enfance. Il avait aussi assuré qu’il avait tourné le film en gardant à l’esprit «l’âge d’or du blockbuster», selon ses propres termes. Voilà tout est dit. Ca résume assez bien l’impression que m’a laissée le film. Pourtant il y a quelques supers idées, la relation père-fille ainsi que la problématique du temps sont deux sujets qui méritent, à mon sens, qu’on s’y attarde et c’est dans cette direction qu’aurait dû partir le film. Mais là on n’a pas le temps de s’arrêter à des choses comme ça, il s’agit de sauver le monde à grand coup de vaisseaux spatiaux et de colonies intergalactiques (je schématise à peine). Matthew McConaughey est bon en père regrettant d’avoir abandonné sa fille sans même pouvoir lui dire au revoir convenablement,  mais au final l’émotion passe un peu au second plan derrière les effets spéciaux et les théories scientifiques.

Toutefois le talent ne se perd pas, le son du film est traité de façon à en faire un élément de mise en scène super important. Assourdissant pas moment il laisse place tout d’un coup au silence total qui nous renvoie à l’immensité du vide absolu de l’univers. Au passage la musique de Hans Zimmer n’est pas magistralement ressortie comme ça arrive souvent mais en même temps, il faut savoir qu’il l’a écrite sans même avoir pu lire le scénario.

Les effets spéciaux sont spectaculaires et très réussis c’est vrai, mais ça ne rattrape pas le manque de fond. En fait, tout ça m’a semblé assez fouillis. Nolan aborde plein plein de thème à travers tout le film : la gestion des ressources naturelles, la nature qui se retourne contre l’homme, l’intérêt de l’exploration spatiale, la possibilité de coloniser d’autres planètes, les relations père-fille, la monoparentalité, le temps, l’instinct de survie… C’est trop ! Pas moyen d’approfondir quoi que ce soit. On passe donc de problématique en problématique sans vraie tentative de réponse de la part de Nolan. Et la fin du film est un peu à cette image. On ne sait plus trop où on est, on ne sait pas du tout où on va. Il y a des « eux » dont tout ce que l’on sait, c’est qu’ils sont en 5 dimensions et il y a Cooper complètement paumé dans l’espace.

Je ne dirais pas qu’Interstellar est un ratage total, mais des plans de l’espace agrémentés d’une tonne d’effets spéciaux ne suffisent pas à faire un bon film. Pas vraiment une déception mais Interstellar n'est clairement pas le meilleur film de Christopher Nolan. On aurait pu s’attendre à mieux.

jeudi 6 novembre 2014

IL ETAIT UNE FOIS… THE TEXAS CHAINSAW MASSACRE DE TOBE HOOPER

Sortie de salle après Massacre à la tronçonneuse de Tobe Hooper. Oui, c'est vrai, ne pas avoir vu ce film constituait un trou béant dans ma culture et je ne parle pas seulement de cinéma d'horreur. Non Massacre à la tronçonneuse est bien plus qu'un simple film d'horreur… C'est une œuvre marquante, un film qui reste encore aujourd'hui une sorte de mythe. Pour s'en convaincre il suffit de poser la question : qui aujourd'hui ne connaît pas ce nom ? Massacre à la tronçonneuse, The Texas Chainsaw Massacre, Blutgericht in Texas, La matanza de Texas… Pour le monde entier ce nom résonne comme quelque chose de terrifiant. Mais qu'est-ce qui rend ce film si spécial ? Que s'est-il passé pour qu'un simple film marque à ce point la culture populaire ?


Un mythe peu en inspirer un autre…

Le film commence par un texte avertissant le spectateur et dont je vous propose une traduction approximative ci-dessous.


"The film which you are about to see is an account of the tragedy which befell a group of five youths, in particular Sally Hardesty and her invalid brother, Franklin. It is all the more tragic in that they were young. But, had they lived very, very long lives, they could not have expected nor would they have wished to see as much of the mad and macabre as they were to see that day. For them an idyllic summer afternoon drive became a nightmare. The events of that day were to lead to the discovery of one of the most bizarre crimes in the annals of American history, The Texas Chain Saw Massacre"

"Le film que vous allez voir relate la tragédie qui a frappé un groupe de cinq jeunes, en particulier Sally Hardesty et son frère invalide, Franklin. Cette histoire est d'autant plus tragique qu'ils étaient jeunes. Mais, aient-ils vécu une très très longue vie, ils n’auraient pas pu prévoir, ni n’auraient voulu voir cette folle macabre comme ils l’ont vu ce jour-là. Pour eux, un voyage lors d’un idyllique après-midi d’été est devenu un cauchemar. Les événements de ce jour-là ont conduit à la découverte de l'un des crimes les plus bizarres dans les annales de l'histoire américaine, Le Massacre à la tronçonneuse"

Ouverture du film (âmes sensibles s'abstenir)

En gros, on nous y explique que ce que l’on va voir est inspiré de faits réels, que c’était horrible et tout et tout. Enfin bref, le ton est donné. Ça va pas être beau à voir et en plus c’est plus ou moins vraiment arrivé.

L’histoire du film s’inspire en effet de la réalité. Plus exactement d’un tueur en série nommé Ed Gein. J’essaierai de vous faire un article sur ce charmant personnage qui a inspiré nombre de tueurs psychopathes du grand écran. Ce dernier est surtout connu pour avoir dépecé ses victimes ainsi que les cadavres fraîchement inhumés qu’il récupérait. Il gardait leur peau pour en faire des abat-jour et divers autres éléments de décoration. Comme je le disais, charmant personnage. Leatherface, le célébrissime tueur à la tronçonneuse, doit son nom au masque de peau qu’il porte. Cette caractéristique est clairement inspirée de notre ami Ed Gein.

Un film fondateur…

Avec The Texas Chainsaw Massacre, Tobe Hooper révolutionne le cinéma de genre en proposant quelque chose qui n’avait jamais vraiment été vu auparavant : le slasher. Pour ceux qui ne sont pas des experts de l’horreur, et je sais que vous êtes nombreux à ne pas partager mon enthousiasme pour ce qui est du sang, de la souffrance, des monstres, esprits, démons, fantômes et autres tueurs psychopathes, nous allons faire une petite parenthèse.

Alors pour faire un Slasher c’est très simple. Il vous faut des jeunes, un peu dans le genre American Pie. Il est très important que ces jeunes soient stupides ! Tous, sauf une. Voilà nous avons notre héroïne. Elle est loin d’être la fille la plus cool du film mais c’est celle qu’on préfère, parce qu’elle est droite, qu’elle a des principes, qu’elle est un peu moins bête que les autres protagonistes et qu’elle est belle mais ne le sait pas. Voilà donc pour les victimes, c’était pas sorcier, hein Jamy !

Il nous faut maintenant un tueur. Il doit être mentalement dérangé, même très très très dérangé si possible. Il doit être quasiment indestructible, porter un masque et avoir une affection particulière pour les armes blanches.

Le pitch est simple. Nos jeunes se retrouvent entre eux (en général c’est soit pour faire la fête, soit pour faire des galipettes) et se font méthodiquement et violemment assassiner par le tueur psychopathe. Voilà le slasher pour ce qui est de la théorie. Pour que vous visualisiez mieux je peux citer Vendredi 13, Scream, Halloween ou encore la saga Freddy Krueger

Et c’est bel et bien une révolution dans le genre. Parce qu’outre le magistral Psychose du non moins magistral Alfred Hitchcock, "Massacre à la tronçonneuse" a été l’un des premiers films à mettre en scène un tueur armé d’un objet de tous les jours. C’est un tournant pour le genre horrifique car dorénavant, plus besoin de monstres ou de mort vivant pour faire peur, un cinglé armé d’un couteau, d’un pied de biche ou de quoi que ce soit d’autre que l’on peut trouver dans un garage et le tour est joué.

Alors bien sûr, il est très difficile de dire avec certitude quand a réellement été initié le genre mais l’usage veut que l’on considère « The Texans Chainsaw Massacre » comme l’œuvre fondatrice. En même temps quand on est réalisateur de slasher mieux vaut se placer comme héritier de « Massacre à la tronçonneuse » plutôt que comme admirateur d’un obscure film de série B novateur certes, mais oubliés de tous.

Car c’est un fait, tout le monde connaît « Massacre à la tronçonneuse » ! Les personnes qui ont vu l’original (dont je fais désormais partie) sont beaucoup moins nombreuses mais faut-il nécessairement qu’un film soit vu pour qu’il entre dans l’Histoire ? Preuve est faite que non. Des cours d’écoles aux maisons de retraite, à Paris comme dans la Creuse, difficile de trouver une personne qui ne connaisse pas le film.

Un contexte historique majeur…

Quand on le replace dans son contexte on se rend mieux compte de la résonnance qu’a pu avoir le film à l’époque. En effet, nous sommes au cœur d’une période cruciale pour les Etats-Unis d’Amérique. Nous somme en 1974, le traumatisme que constitue la guerre de Vietnam est dans tous les esprits et le scandale du Watergate est remonté jusqu’aux plus hautes sphères du pouvoir poussant le président Nixon à la démission début août 1974. C’est dans ce contexte plus que tendu qu’est sorti « The Texas Chainsaw Massacre » pour la première fois, plus exactement le 1er octobre 1974.

Le contexte politique permet bien évidemment de remettre en perspective la portée sociologique du film. Voyons l’état de cette famille, dégénérée, folle et malsaine, comme une allégorie de l’état du monde politique et même de la société américaine de l’époque. Le film dans son entier a d’ailleurs été interprété comme la critique sociétale d’une époque décadente où l’Amérique envoyait ses enfants se faire massacrer au Vietnam. C’est glauque, sale et pas vraiment glorieux. Tout comme Leatherface, certains hommes politiques n’avaient pas peur de se salir les mains, sans aller jusqu’à suspendre leurs adversaires à des crocs de boucher mais quand même. Tiens d’ailleurs, scandale politique et croc de boucher ça me rappelle quelque chose… Spécial dédicace à N.S. et D.d.V. Nous clorons sur cette blagounette en disant simplement que ce n’est pas uniquement grâce à ses caractéristiques cinématographiques que « Massacre à la tronçonneuse » est devenu culte. Je dirais même que se sont avant tout les histoires qui entourent le film qui l’ont rendu historique à son tour.

Un mythe dès le tournage…

Le tournage a eu lieu au Texas, plus exactement à Austin, Bastrop et Round Rock pendant l’été 1973. Initialement prévu pour durer 7 jours, les enregistrements se sont finalement étalés sur plus d’un mois à cause d’un budget serré et de divers événements imprévus, survenus sur le tournage.

Le mythe qui entoure le film doit beaucoup à ce tournage qui a profondément marqué tous ceux qui y ont participé. En effet, l’été de l’an 1973 fut caniculaire au Texas avec des températures atteignant allégrement les 40°C. La petite ville de Round Rock où se situe la ferme qui sert de décor au film a également connu cet été là, des taux d’humidités proche des 100%, attirant les insectes et rendant l’air absolument irrespirable. Enfin, pour parachever ces conditions infernales, imaginez l’odeur pestilentielle que devaient dégager les ossements et autres cadavres d’animaux servant d’accessoires pour le film. Eh oui, Tobe Hooper étant un réalisateur consciencieux et un peu à cours de moyens, pas question d’investir dans des accessoires en plastiques. Les vrais cadavres d’animaux ça coûte beaucoup moins cher et c’est plus réaliste. Dès lors on imagine assez bien les nausées qu’a pu provoquer ce mois de tournage. Télérama nous rapporte le témoignage de Dottie Pearl, maquilleuse sur le tournage :
«C'est malsain. Nous travaillons sur un film malsain et nous devenons malades. Nous avons tous un sentiment de dégoût par rapport à nous-mêmes.»
Bien sûr on n’aurait pas aimé y être mais on sait pertinemment que c’est grâce à ces conditions exécrables que le rendu final est aussi efficace.

Grâce aux conditions mais aussi à Tobe Hooper et Gunnar Hansen (Leatherface). En effet, ils se sont personnellement beaucoup invertis sur l’écriture et le tournage du film, poussant parfois les autres participants dans leurs derniers retranchements. Hansen avait décidé de ne jamais adresser la parole aux autres acteurs afin de conserver l’aura que lui conférait son rôle. A tel point que Marilyn Burns et les autres en était terrifiés. L’implication d’Hansen vis-à-vis de son personnage ne date pas du tournage. En effet, il a participé à la création de Leatherface et s’est énormément investi pour le rôle. C’est lui qui a voulu que Leatherface soit handicapé mental et afin de mieux coller à la vision qu’il avait du personnage, il s’est rendu dans des institutions pour handicapés mentaux où il s’est imprégné de la façon qu’ont ces personnes de s’exprimer et de se mouvoir.

De son côté Hooper maltraitait en permanence ses acteurs pour les maintenir dans un état de tension et de fatigue extrême. Marilyn Burns racontera d’ailleurs une anecdote autour de la scène que j’appellerai « scène du repas de famille ». Elle et Hansen racontent qu’il a fallu 26 heures de tournage pour enregistrer ces 5 minutes de film. Eprouvant il est vrai, d’autant plus que, pendant cette scène, Sally est ligotée à une chaise, à la merci d’une famille de psychopathes cannibales dégénérés en pleine frénésie meurtrière. Je vous laisse imaginer le trauma émotionnel qu’ont pu représenter ces 26 heures de tournage pour l’actrice. Le résultat à l’écran est d’ailleurs absolument hallucinant. La terreur qu’exprime le regard de Marilyn Burns ne semble pas feinte, elle ne l’est sans doute pas d’ailleurs, Burns est bel et bien au bord de la crise hystérique aigue, la respiration haletante, la bave aux lèvres et les yeux injectés de sang…

Les incidents de tournage participent eux aussi à la légende du film. En effet, Marilyn Burns (encore elle) s’est blessée en tournant la scène de la poursuite dans les ronces avec Leatherface (scène sur laquelle on reviendra). Selon la légende, une partie du sang qui macule ses vêtements ne serait donc pas faux mais bel et bien le sang de la jeune actrice. Un réalisme à faire froid dans le dos.

Burns ne fut pas la seule à se faire mal pendant le tournage. En effet, pour plus de réalisme, les bruitages de tronçonneuse sont presque tous intradiégétiques, ce qui veut dire que de vraies tronçonneuses tournaient sur le plateau. Et bien sûr, à faire tournoyer une tronçonneuse en marche au-dessus de sa tête, on finit par se blesser. C’est ce qui est arrivé à Gunnar Hansen.

Vous l’aurez compris, le tournage de Massacre à la Tronçonneuse ne fut pas de tout repos pour ses participants. Le pire je pense, c’est que le film ne serait pas le chef-d’œuvre qu’il est si les conditions de tournage n’avait pas été aussi infernales. Ce sont sans doute ces conditions extrêmes qui donne au film ce côté si crade et malsain. C’est de ce genre d’anecdotes et d’histoires que naissent des légendes cinématographiques, d’autant plus quand l’homme qui dirige le tout est sans conteste très talentueux.

Une sortie mouvementée…

Jaquette de la première l'édition VHS
chez René Chateau
Le film débarque dans les salles américaines le 1er octobre 1974 avec une classification R, soit interdit au moins de 17 ans non accompagnés d’un adulte. Le peu de violence visible à l’écran dans « Massacre à la tronçonneuse » trouve d’ailleurs son origine dans cette classification car force est de le reconnaître, la violence de Massacre à la tronçonneuse est bien moins impressionnante que ce que laisse présager son titre. En effet, Tobe Hooper, à la recherche du plus large succès possible, souhaitait que le film soit classé PG-13 (Accord parental recommandé, film déconseillé au moins de 13 ans). Il a donc volontairement allégé la violence visible à l’écran, mais de mon point de vue, le film mérite amplement son classement R pour toute la perversion, l’ambiance malsaine et la violence morale et psychologique qu’il développe. Malgré ce classement, il rapportera 600 000 $ en quatre jours aux Etats-Unis. En France, il a été interdit après seulement une semaine d’exploitation. 5 ans plus tard, une sortie en VHS fut autorisée mais il fallut attendre 1982 pour enfin pouvoir voir le chef-d’œuvre en salle, à condition bien sûr d’avoir plus de 18 ans. A noté d’ailleurs que pour sa ressortie en 2014, le film était seulement interdit aux moins de 16 ans.

Et la France ne fut pas la plus restrictive en la matière. En Finlande, le film fut interdit dès sa sortie en 1974 et ne put être vu en salle que 22 ans plus tard en 1996. La censure la plus dure fut appliquée en Grande-Bretagne où le film est resté interdit de 1974 à 1999. Tout ceci fait de « Massacre à la tronçonneuse » un des films les plus censurés de l’histoire du cinéma et cela participe évidemment à sa légende.

Pour finir…

The Texas Chainsaw Massacre est un chef-d’œuvre. Un chef-d’œuvre du cinéma d’horreur mais avant tout du cinéma en général. La mise en scène atteste d’une absolue maîtrise de la part de Tob Hooper, les acteurs semblent vraiment terrorisés et à bout de force (mais ça c’est peut-être bien parce qu’ils le sont). Le cadrage est juste excellent quant à la manière qu’a Hooper de jouer avec la lumière, c’est quelque chose de rare dans un film de genre. Cette mise en scène plein de maîtrise en est non moins extrême. Pas vraiment dans ce qu’elle montre mais d’avantage dans sa façon de le montrer. La caméra est aussi folle que les monstres qu’elle film, se laissant parfois aller à de très gros plan des visages terrorisés des victimes ou bien de ceux des tueurs.

Et pour illustrer la virtuosité d’Hooper, reparlons un peu de la scène de la poursuite dans les ronces. Sally est poursuivie par Leatherface aux abords de la ferme. Ce dernier fait vrombir sa tronçonneuse et se rapproche de plus en plus de la jeune fille. Il se rapproche sans jamais la rattraper, si bien que la tension monte de plus en plus dans le public. A un certain moment elle est tellement insoutenable qu’on en vient presque à souhaiter que Sally se fasse attraper une bonne fois pour toute, mais comme à chaque fois elle s’en sort de justesse.

Quoi qu’on en dise, quoi qu’on en pense, « Massacre à la tronçonneuse » reste un film culte et il n’est pas nécessaire d’aimer le cinéma d’horreur pour le reconnaître…

lundi 3 novembre 2014

IL ETAIT UNE FOIS… MEMENTO, DE CHRISTOPHER NOLAN

Vous pouvez aussi retrouver cet article dans le dossier sur Christopher Nolan d'Abusdecine.com

C'est l'histoire d'un film d'exception, un film qui s'affranchit de toutes les règles de narration, un film renversant qui a porté plus d'un cerveau à ébullition. Il s'agit du second long métrage d'un réalisateur britannique qui deviendra par la suite un poids lourd à Hollywood. A la fois révolutionnaire et fondateur, "Memento" ne laisse personne indifférent. Mais quelle est son histoire, son message ? Dans quel contexte a-t-il été écrit et réalisé ? Finalement la question est simple: qu'est-ce qui fait de "Memento" un grand film ?

Une histoire de famille…

L'histoire commence en 1996, au mois de juillet. Christopher Nolan et son frère Jonathan traversent les Etats-Unis en direction de Los Angeles où Christopher part s'installer. La discussion se porte alors sur une ébauche d'histoire, un concept sur lequel travaille Jonathan. L'histoire d'un homme à la mémoire défaillante qui tente tant bien que mal de venger la mort de sa femme. Christopher est séduit et décide alors de travailler sur un scénario pour le cinéma. Quant à Jonathan, une fois de retour à Washington où il poursuit ses études, il décide d'entreprendre la rédaction d'une nouvelle basée sur la même histoire. Pendant plus d'un an, les deux frères vont continuer à correspondre afin d'échanger leurs doutes, leurs idées et la vision globale de leurs deux projets.
En 1997, Emma Thomas épouse Christopher et commence une carrière dans la production audiovisuelle. C'est elle qui présentera à Aaron Ryder, un des dirigeants de Newmarket Films, le scénario de Memento qu'a rédigé son mari. Ryder en restera cloué sur son fauteuil et déclarera: c'est "peut-être le script le plus innovant que j’ai jamais vu." Peu après cela, Newmarket confie 4,5 millions de dollars à Nolan pour réaliser son second long métrage.

Le puzzle "Memento"…

On pourrait résumer le génie narratif de Christopher Nolan par une seule de ses idées. Une idée qu'il a eu deux mois environ après avoir commencé à travailler à partir de l'idée de Jonathan. Memento sera un film sur la mémoire de Léonard Shelby, mais il aura beaucoup plus d'impact s'il manœuvre aussi la mémoire du spectateur. D'où l'idée géniale de monter le film en séquences anti-chronologiques. Ainsi Nolan transforme un simple film sur la mémoire en une véritable expérience. C'est grâce à cette idée que le scénario final voit le jour en 1997. C'est également cette idée géniale qui poussera Ryder à croire et à investir dans le projet.
En réalité, il ne s'agit pas simplement de raconter l'histoire de manière anti-chronologique. En effet, l'histoire principale est tournée en couleur et son intrigue nous est présentée de la fin vers le début, mais des scènes en noir et blanc, montées dans l'ordre chronologique s'intercalent parmi les séquences de l'histoire principale. Et c'est là que tout cela devient très intéressant. Les scènes en noir et blanc constituent une sorte de prologue à l'histoire principale. Cependant, elles sont présentées aux spectateurs en parallèle de cette dernière. On ne peut parler ni de flash-back, ni de flash-foward, les deux histoires évoluent en parallèle pour finir par ce rejoindre au bout d'une heure et 53 minutes de film. La fin du film est donc le milieu de l'histoire. En effet, les deux intrigues commencent au début du film, la partie 1 (en noir et blanc) va dans l'ordre tandis que la partie 2 (en couleur) qui est en fait la suite de la partie 1, part de la fin pour retourner vers le début. Le passage du noir et blanc à la couleur qui intervient à la fin du long métrage marque donc le milieu de l'intrigue imaginée par Nolan.
C'est en grande partie la manière dont il est construit qui fait de Memento un grand film, un film qu'il faut avoir vu pour se prévaloir d'une quelconque culture cinématographique. Ce talent pour la narration combiné à ce qui ressemble à de l'aversion pour la linéarité, c'est cela le cinéma de Christopher Nolan. Nous ne sommes qu'en 2000, soit dix ans avant Inception, mais on sent déjà cette virtuosité, ce talent pour raconter une histoire comme personne d'autre n'aurait pu le faire. Nolan se joue complètement du temps et de l'espace. Ils ne deviennent que des accessoires, des accessoires au service de sa narration. Il s'en joue mais en garde toujours la maîtrise. D'ailleurs il déclara en 2000 au site indiewire.com : "Evidemment j'ai utilisé des dispositifs de continuité comme dans Following: les blessures, l'apparence, toutes ces choses qui donnent des indices quant à l'endroit où vous êtes chronologiquement et la relation entre les différentes scènes." Aussi complexe que soit le script de "Memento", Nolan en garde une parfaite et absolue maîtrise. Comme dans Following ou Inception, chaque élément, chaque accessoire peut nous servir à nous repérer, à spéculer, à interpréter l'histoire dont on est témoin. Je cite "Inception" car le web regorge de théories plus ou moins fondées sur la fin du film et les diverses interprétations qui peuvent en découler.
On touche ici à une nouvelle particularité du cinéma de Nolan. Il laisse au public le soin de se creuser la cervelle avec d'innombrables interprétations (comme je suis en train de le faire). Chaque scène, chaque indice peut être disséqué. Plusieurs hypothèses sont possibles et le restent parfois jusqu'à la fin du film. Le parfait exemple de ce genre de fin "ouverte" étant encore une fois "Inception".
Dans Memento Nolan nous laisse le choix. Teddy peut être un menteur qui essaie jusqu'au bout de profiter du handicap et de l'obsession de Léonard. Ou alors il dit la vérité et il ne cherche qu'à protéger Léonard de lui-même. Certains flash-back vont dans ce sens comme cette scène en noir et blanc où l'on voit Sammy dans son hôpital psychiatrique puis Léonard à sa place en image subliminale. Un autre flash-back, où on voit Léonard et sa femme allongés, prend partie pour Teddy. "John G. Rapes and murdered my wife" (John G. A violé et tué ma femme) il est écrit: "I've done it" (Je l'ai fait). Cette partie du tatouage n'existe que dans ce flash-back. Elle semble donc être un indice de plus que nous lance Nolan.
Cependant dans certaines éditions du DVD, les commentaires audio de Nolan indiquent le contraire:

« À ce stade du récit, le public en est à un tel point, il a une telle soif de vérité, tout comme Leonard, qu'il accepte les explications du menteur [Teddy]. Le public accepte ces réponses parce que c'est ce qu'il veut. C´est ce qu'il attend. On a voulu remettre ça en cause. Les gens s'accrochent à cette grammaire du cinéma, qui veut que l'on nous dévoile la vérité à la fin, alors que ce film la défie clairement »
— Christopher Nolan, Commentaire audio DVD

L'ouverture…

Le film commence par un fondu au noir sur un tirage de Polaroid. Etrangement, au lieu de devenir de plus en plus claire, la photo s'assombrit. On se rend alors compte que cette scène d'ouverture se déroule en fait dans le mauvais sens, comme si on la rembobinait.
Quand on connaît l'intrigue de Memento et ses particularités, cette scène devient très intéressante. Elle a pu être montée de cette manière afin d'indiquer au spectateur le "sens" de l'histoire et ce avant même qu'elle ne commence. Mais la photo qui s'assombrit peut tout aussi bien figurer la mémoire. Au lieu d'être de plus en plus claire, la mémoire se ternit, elle s'assombrit comme le fait la photo à l'image. Cette deuxième interprétation donne à réfléchir. Serait-ce une manière pour Nolan de nous dire qu'on ne peut pas faire confiance à sa mémoire et qu'elle ne peut pas non plus être fixée sur Polaroid ? Il s'agirait alors, comme dans Inception, d'un indice laissé à l'attention du spectateur, un indice qui pourrait l'éclairer une fois le film terminé afin de l'amener à une interprétation.

La jonction…

Il s'agit du meurtre de Jimmy Grantz ou plus exactement du développement de la photo du meurtre. En effet, Léonard, qui ne sort jamais sans son Polaroid, prend en photo les meurtres qu'il commet afin de ne pas oublier sa vengeance. Lorsque Léonard secoue la photo de Grantz celle-ci apparait petit à petit et dans le même temps l'image se colore. Dans l'ordre chronologie de l'histoire, il s'agite de la première scène en couleur. Il s'agit d'un moment clé, un moment extrêmement important dans le film. Il vient juste après le dénouement (lequel intervient donc en réalité au milieu de l'histoire), c'est le moment où tout s'éclaire, où tout s'imbrique. Les scènes en couleur et en noir et blanc se rejoignent et c'est alors que tout prend sens. Tout s'éclaire, tout se colore comme le fait le film. On comprend le lien entre scène en couleur et en noir et blanc mais avant tout, on comprend tout des motivations de Léonard, des petits mots qu'il s'est écrit etc.

Note à moi-même…

En définitive Memento est une enquête. Une enquête que mène le spectateur à propos de Léonard Shelby. Qui est-il ? Comment en est-il arrivé là ? Pourquoi fait-il tout cela ? Mais avant tout, pourquoi s'est-il laissé cette note ? Au cours du film on revient dans le passé en allant de note en note. Pourquoi ne doit-on pas faire confiance à ce personnage ? Pourquoi doit-on croire celui-ci ? Comme un fil rouge, c'est cette dernière question que Léonard doit constamment se poser mais qu'il finit par ignorer sachant très bien qu'il n'en aurait jamais la réponse. Il n'a donc d'autre choix que de faire aveuglément confiance aux notes qu'il prend. Pendant l'une des scènes en noir et blanc Shelby explique que le conditionnement l'aide à vivre et qu'à cet égard il agit par instinct à la manière d'un chien de Pavlov. En réalité c'est à la fois ce qui l'aide à vivre et ce qui le fait tourner en rond à la recherche de John G. Car pour vivre il n'a d'autre choix que de faire aveuglement confiance à ses notes, ainsi il choisit à chaque instant ce qu'il doit retenir ou oublier. Il peut ainsi se convaincre lui-même qu'une personne n'est pas digne de confiance, même si au départ ce n'est pas la réalité. En ne gardant confiance qu'en lui-même et en se faisant manipuler par ses propres émotions, Shelby ne se sauve pas, il creuse sa propre tombe…

La vengeance…


Un des thèmes récurrents chez Nolan est la mort de la femme du héros. Mort pour laquelle ce dernier se sent coupable, que ce soit à tort ou à raison. On retrouve notamment ce schéma dans Le Prestige ou dans Inception. Dans Memento c'est moins la culpabilité que la vengeance qui anime Shelby.
De ce point de vue, Nolan apporte une réponse intéressante. La vengeance serait une fin en soit. Je m'explique, le personnage principal ne cherche qu'une chose durant tout le film, venger la mort de sa femme. C'est écrit sur sa poitrine et à chaque regard dans le miroir il se souvient qui a tué sa femme, c'est amplement suffisant pour en faire une obsession d'autant plus lorsqu'on est incapable de savourer sa vengeance plus de cinq minutes. C'est cette objection que pose Teddy à Léonard à la fin du film. Comment peux-tu être si sûr de ne pas déjà avoir trouvé l'homme que tu cherches. Et puis quand bien même ce ne serait pas déjà fait, tu oublieras ta vengeance quelques minutes après l'avoir exécutée, alors à quoi bon ? C'est précisément à cette question que répond Nolan. C'est vrai, cette vengeance est absurde. Elle ne servira à rien et ne soulagera pas non plus Shelby puisqu'il l'oubliera. Mais ce n'est pas ce que souhaite ce dernier. Non, en réalité Léonard Shelby ne souhaite qu'une chose, chercher l'assassin de sa femme. Il le dit lui-même dans l'une des toutes premières scènes en noir et blanc : "Sammy n'avait pas de motivation pour vivre. Moi… oui… j'ai une motivation." Chercher l'assassin de sa femme est la seule chose qui le maintient en vie. Se venger ne l'intéresse pas vraiment, non ce qu'il souhaite c'est chercher et imaginer sa vengeance, au point qu'il se crée lui-même des puzzles insolubles en se servant de sa maladie.

Mais qui est donc Sammy Jankis ?

Personnage extrêmement important que celui-ci. Sammy Jankis sert d'exemple à Léonard pour nous exposer son problème, son "état" comme il l'appelle lui-même. A chaque oubli, le premier tatouage que voit Shelby est celui qu'il a sur la main gauche "Remember Sammy Jankis", c'est ce tatouage qui lui permet de ne pas perdre complètement pied et de se souvenir de ce qui lui arrive. C'est pourquoi il radote l'histoire de Sammy Jankis à tout le monde, pour expliquer son état et pour ne pas l'oublier lui-même.
Tout au long du film un parallèle se crée donc entre l'histoire de Sammy et celle de Shelby. Sammy était un comptable en fin de carrière mais suite à un accident de voiture, il a perdu sa mémoire à court terme ne pouvant plus créer aucun souvenir. C'est alors qu'il rencontre Léonard Shelby. Ce dernier a été envoyé par la compagnie d'assurance de Sammy pour essayer de prouver que ce dernier n'a aucun problème d'ordre physique. En bon enquêteur des assurances il y parvient. Sammy Jankis ne sera pas couvert, c'est à sa femme de payer les frais médicaux. Cette dernière est diabétique et c'est Sammy qui lui fait ses injections quotidiennes. Décidée à comprendre ce qui arrive à son mari, Mme Jankis décide de le mettre une dernière fois à l'épreuve. Elle demande à Sammy de lui faire son injection d'insuline, puis quelques minutes plus tard, elle recule l'heure de sa montre et recommence. A chaque fois Sammy fait l'injection ne se doutant pas qu'il en a déjà fait quelques minutes plus tôt. Finalement, sa femme tombe dans un coma dont elle ne sortira jamais. Il est ensuite placé dans une institution où il vivra sans savoir que sa femme est morte.
L'histoire de Sammy est d'autant plus intéressante qu'elle comporte de nombreuses similitudes avec celle de Léonard. Ils souffrent tous deux d'amnésie antérograde soit l'incapacité à retenir de nouvelles choses et leurs femmes respectives sont mortes dans des circonstances plus ou moins liées à leur maladie. Le flash-back à la toute fin du film, juste après la révélation de Teddy, où on voit Léonard en train de faire une injection d'insuline à sa femme semblent indiquer que c'était en fait la femme de Léonard qui était diabétique. Selon Teddy, Sammy Jankis n'aurait été qu'un simple escroc démasqué par Léonard. D'un autre côté Teddy a déjà profité de la faiblesse de Léonard en le poussant à tuer, il pourrait très bien être en train de le refaire. Le film soulève encore une énième question, qui était vraiment Sammy Jankis ?

Confiance et mémoire…

Memento pose une question fondamentale. A quel point notre passé et les souvenirs qu'on en garde nous définissent-ils ? Que serions-nous sans ces souvenirs ? Car même s'il est en pleine possession de ses moyens physiques et cognitifs, un homme n'est qu'un légume s'il ne peut se souvenir de rien pendant plus de cinq minutes. On remarque au cours du film que Léonard Shelby est quelqu'un de très intelligent mais aussi quelqu'un au regard et au sens affutés, des qualités qui lui viennent de son ancienne carrière d'enquêteur en assurance et qui l'aident au quotidien pour surmonter ses problèmes de mémoire. Rigueur, méthode, méfiance envers les autres et confiance absolue en ce qu'il se note, voilà les règles de vie de Léonard Shelby. La faculté à se souvenir est étroitement liée à la confiance qu'on place dans certaines personnes. On fait confiance à quelqu'un car on se rappelle qu'on peut le faire sans risque. C'est une chose dont Léonard est incapable depuis son accident. Il est donc contraint de suivre sa première impression, son instinct. Il n'y a aucun recul dans les notes qu'il prend au dos de ses photos, mais il leur fait tout de même entièrement confiance.
Memento démontre à quel point mémoire et confiance sont liées et à quel point il est difficile de faire la part des choses lorsque l'on n'a absolument aucun moyen de les mettre en perspective. Léonard n'a d'autre choix que de faire confiance à son instinct, une confiance aveugle et dangereuse qui le rend en même temps très seul. Cette part d'ombre ressort visuellement dans le film grâce aux décors et à la lumière choisis par Nolan. De petits motels miteux de Californie et une lumière assez terne donnent au film ce côté mystérieux et un peu oppressant. Le tournage était d'ailleurs initialement prévu à Montréal, il a été déplacé à L.A. afin de créer une atmosphère plus réaliste et noire pour le film.

Réception

Avec le prix du jury au Festival du cinéma américain de Deauville en 2000, deux nominations aux Oscars en 2002 et le prix du meilleur nouveau cinéaste aux MTV Movie Awards pour Christopher également en 2002, Memento est un énorme succès critique. Avec ce film, Nolan éclabousse Hollywood de son talent. A l'aube du troisième millénaire, plus personne dans l'industrie du cinéma ne peut ignorer ce jeune réalisateur britannique.
Après cette impressionnante tournée des festivals, aucune difficulté pour trouver des distributeurs étrangers. Le film a été projeté dans plus de 20 pays à travers le monde et a réalisé près de 224 000 entrées en France. Au Etats-Unis la mission fut plus périlleuse. Newmarket Film a été obligé de distribuer lui-même le film, un geste risqué financièrement mais qui a payé, notamment grâce au cinéaste Steven Soderberg qui n'a pas tari d'éloge sur Nolan et son long métrage. Le film a finalement engrangé près de 40 millions de dollars dans le monde dont plus de 25 millions et demi aux USA.
Enfin, pour de nombreux experts médicaux, Memento est une des représentations les plus fines et les plus réalistes de l'amnésie antérograde. Pour Christof Koch, neuroscientifique américain, Memento est "la représentation la plus précise des différents systèmes de mémoire dans les médias populaires". Le médecin Esther M. Sternberg, du National Institute of Mental Health (Institue National de le Santé Mentale), identifie quant à elle le film comme "proche de l'exploration parfaite de la neurobiologie de la mémoire".
Après ce succès auprès du public, de la critique et des experts la Warner offrit à Nolan l'opportunité de récidiver en lui confiant d'abord un remake du thriller norvégien Insomnia de Erik Skjoldbjærg ainsi que la réalisation de la nouvelle trilogie Batman.

Travail de fan

Il existe de nombreux montages du film remis dans l'ordre sur le web en plus de celle présente sur l'édition collector du DVD. Un travail que l'on doit à certains fans du film et qui permet de voir les choses du point de vue des autres protagonistes (ceux qui n'ont pas de problèmes de mémoire)…

samedi 1 novembre 2014

The Giver : Une bonne surprise

The Giver est une adaptation d'un roman sortie en 1993 en France sous le titre Le Passeur. Ce livre destiné aux adolescents, fut un énorme succès, bien avant la sortie de saga telle que Twilight ou  Hunger Games. Nouveau venu dans la grande famille des adaptations de best-seller pour ado, The Giver aurait pu n'être qu'un énième blockbuster tiré d'un livre à succès. Mais ce film a été pour moi une très bonne surprise. Il nous dépeint une vraie dystopie qui est le centre du film. L'histoire et son message ne sont que peu déportés sur une quelconque histoire d'amour comme dans Hunger Games ou sur des effets visuels comme dans Le Labyrinthe. Non, ici l'histoire se suffit à elle-même.
Comme dans toute dystopie qui se respect, la société que nous présente Phillip Noyce est basée sur le contrôle. Un contrôle absolu qu'exercent les "sages" sur les membres de la "communauté". Ces "sages" ne sont d'ailleurs qu'évoqués pendant le film. En effet, la société dans laquelle évolue Jonas semble être dirigée uniquement par le personnage de Meryl Streep, une facilité que s'est permis le film. Plus facile de décrédibiliser cette société si une seule personne semble la diriger en despote.
Le film pose de vraies questions, ce qui est souvent trop rare dans les productions destinées à un public adolescent. En effet, dans une société où toute altérité et toute identité est au plus vite gommée, qu'est-on vraiment ? Qui suis-je si je suis identique à tous les autres ? La liberté et l'altérité sont des thèmes très souvent abordés dans les films dystopiques, mais c'est le questionnement sur la mémoire collective qui rend The Giver vraiment intéressant. En effet, le "passeur," dont le film tire son nom, est la seule personne à posséder toute la mémoire du monde. Le reste de la population vie dans une totale ignorance quant au passé de l'humanité et à ce que fut autrefois le monde. N'ayant aucun objet de comparaison, chaque individu se complaît dans cette société sans liberté aucune.
La dernière chose, sans doute la pire, dont sont privé les habitant de la communauté est l'émotion. Rendus incapables d'éprouver quoi que ce soit, ils en ont même oublié le sens du mot aimer. Les mécanismes utilisés par les sages pour en arriver à ce résultats sont, pour certains, mis en avant de manière très intéressante. Outre les injections anti-émotion que reçoivent les citoyens chaque matin, ils baignent depuis l'enfance dans une rhétorique construite pour leur inculquer la valeur positive de l'égalité absolue et de l'absence de vraies émotions. La peur devient l'anxiété, l'amour devient la jovialité, la rage devient le mécontentement, etc.
Sur le plan cinématographique, l'imagerie futuriste nuit presque à la force évocatrice de l'histoire mais cela reste acceptable. Les images du passé (notre présent) ont vraiment une teinte, une énergie différente du reste du film. Il n'y a pas grand chose à dire de plus, si ce n'est que le passage du noir et blanc (le monde  sans émotion) à la couleur est très bien rendu, tout en finesse. Cependant il faut savoir que ce sont les fans du livre qui ont obtenu de la production que l'absence de couleur soit réintégrée à l'histoire. On se dit alors que la vraie œuvre est sans aucun doute le livre de Lois Lowry car au départ, le film devait être intégralement tourné en couleur, perdant par là même un grand intérêt et une partie fondamentale de l'œuvre d'origine.
Mais grâce à cette fanbase de lecteurs, le rendu final est tout à fait honorable. The Giver est somme toute une bonne adaptation pour quelqu'un n'ayant pas lu les livres. En effet, le film fait bien ressortir les enjeux et les questions que soulève la dystopie imaginée par Lowry. Une bonne surprise…

mardi 28 octobre 2014

Besoin de votre aides !

Un petit sondage qui devrait bien m'aider dans la rédaction de mon mémoire... Ca ne vous prendra qu'une minute...

jeudi 23 octobre 2014

Le Labyrinthe : A peine divertissant...

Aujourd’hui on parle film à succès, film à gros budget, film à minettes de 15 ans… Enfin bref, aujourd’hui, Le Labyrinthe

J’ai pu entendre pas mal de choses à propos de ce film depuis quelques semaines. Un peu de tout, même si dans leur globalité, les avis étaient plutôt positifs. J’ai donc voulu me faire mon propre avis. Cette mode de l’adaptation de best-seller de la littérature adolescente donnera-t-elle naissance à de bons films ? Parce que jusqu’ici, force est de constater que niveau cinéma c’est très moyen tout ça. Rappelez-vous, tout a commencé il y a près de 15 ans, en 2001 exactement avec Harry Potter à l’école des sorciers, adaptation du premier tome de la saga de J.K. Rowling. Harry Potter c’était du jamais vu. Pour la première fois, un ouvrage destiné à la jeunesse rencontrait un immense succès commercial et critique. Résultat : aujourd’hui tout le monde connaît Harry Potter et les studios Hollywoodiens ont compris que la jeunesse était un marché très porteur, d’autant plus lorsqu’on adapte des histoires ayant déjà fait leurs preuves. Du coup en mettant 34 millions de dollars entre les mains de l’inexpérimenté  Wes Ball dont c’est le premier long-métrage, la Fox s’est dit qu’elle faisait une bonne opération. Et l’importante fanbase qui se pressera dans les salles pour voir ce qu’Hollywood a fait de ses héros lui donnera très probablement raison. Mais alors, peut-être que le cinéma ne se résume qu’à du marketing. Un film est un produit qui répond à une demande des consommateurs. Mais perso, je n’aime pas trop l’idée de « consommer du cinéma. » Un film n’est pas censé être un produit issu d’une stratégie marketing ! Dans mon idéal naïf de l’art, un film est une œuvre censée faire passer un message, une émotion, transmettre le fruit de la réflexion d’un réalisateur. Mais dans le cas qui nous intéresse, c’est pas trop l’ambiance…
Nous voici donc enfermés pendant près de deux heures dans « Le Bloc », sorte de prison à ciel ouvert ou des dizaines d’adolescents mâles sont laissés à l’abandon depuis 3 ans. Car autour du bloc se trouve un immense labyrinthe peuplé de monstres mangeurs d’hommes. Il est d’autant plus difficile à franchir que sa configuration change chaque nuit. Les jeunes habitants du bloc se sont baptisés les « blocards » et chaque mois, un énorme ascenseur qu’ils ont nommé « la boîte » (bah ouais parce que ascenseur c’est trop nul comme nom !) leur livre des vivres et un nouveau blocard tout neuf. Et cette fois c’est Thomas (Dylan O’Brien). Comme tous les autres il ne se rappelle d’absolument rien, mis à part son nom. Il commence alors à évoluer dans son nouvel environnement et tente de trouver un moyen de s’évader…
Le film s’inspire clairement de Cube. Nous sommes dans un labyrinthe qui bouge en permanence et dont il est, semble-t-il, impossible de s’enfuir. Les personnages progressent, essayant d’éviter les pièges mais ils se retrouvent inexorablement de moins en moins nombreux. Les phases d’enquête et d’action se succèdent sans réelle surprise mais avec style. C’est vrai que les monstres et les scènes d’action ont de la gueule, quant aux décors, primordiaux pour l’histoire, ils sont vraiment réussis.
Mais il y a plein de trucs qui ne vont pas dans ce film ! D’abord les personnages sont de véritables clichés ambulants. Il y a le héros, son fidèle bras droit fort, loyal et courageux, le chef sage que tout le monde écoute et respecte, le petit gros qui sert de faire-valoir au héros, l’idiot qui se sent menacé par le héros et qui va tenter par tous les moyens de lui mettre des bâtons dans les roues et enfin la super jolie fille. C’est lourd et ultra prévisible la plupart du temps, mais de temps à autre les réactions des personnages nous surprennent par leur bêtise. L’idiot propose par exemple d’envoyer le héros au mitard pendant une semaine sans eau ni nourriture pour avoir sauvé la vie de deux de ses camarades pris au piège dans le labyrinthe. Tout est super appuyé, l’idiot est extrêmement idiot, le héros est extrêmement héroïque et ainsi de suite.
Les scénaristes ont aussi pris quelques libertés avec les lois de la physique. L’idiot qui était resté bouder dans le bloc pendant l’évasion se retrouve comme par magie aux côtés des fuyards à l’extérieur. Si c’était si facile pourquoi avoir attendu trois piges pour se téléporter dehors ?! C’est hallucinant de débilité, une sorte d’énorme bras d’honneur du film à l’attention de son public. Je me demande même si cette scène n’est pas là juste pour faire mourir Chuck (le petit gros) et pour qu’on ait droit à cette autre scène encore jamais vue au cinéma : le pote du héros est mourant et dit à ce dernier de continuer sans lui. Avant de mourir, il lui demande aussi de transmettre un dernier message à un de ses proches. C’était le moment émotion merci d’être venu Messieurs-Dames. Et après réflexion à propos de cette mystérieuse téléportation, c’est vrai que c’est un peu bizarre quand même. Pas la téléportation en elle-même, mais le fait que les mecs tournent en rond depuis 3 ans dans leur bloc, Thomas arrive et en trois jours ils sont dehors. Je sais pas ce qui s’est passé pendant trois ans mais il y avait surement un truc à optimiser dans votre façon de fonctionner les gars.
Et au terme d’un final totalement abracadabrantesque, on découvre les motivations sans queue ni tête des geôliers.

ATTENTION SPOILER

Alors en gros il y a eu une sorte d’éruption solaire qui a cramé la Terre puis un virus attaquant le cerveau s’est propagé, enfin c’était la merde quoi. Mais une nouvelle génération d’humain s’est révélée être immunisée contre le virus. Il fut donc décidé de tous les enfermer au cœur d’un immense labyrinthe, une décision pleine de bon sens et de logique… Alors apparemment c’est un test. Mais un test de quoi bande de crétins, ces mecs sont probablement la seul chance qu’il vous reste pour sauver l’humanité, un peu comme s’ils étaient des seringues de vaccin humaines. Alors pourquoi leur faire passer un test au cours duquel ils ont de grande chance de mourir ?! Pourquoi leur faire passer un test tout court ?! Ils sont immunisés, ils vont servir à élaborer un vaccin, mais à quoi ça sert de leur faire passer plein d’épreuves ?! Ils ne seront pas plus immunisés après ! Et en plus ce n’est que la phase 1 de ce plan complètement débile ! La phase 2 doit vraiment valoir le détour. En plus entre temps on découvre que la chef des méchants a mis en scène son suicide pour nos petits fuyards. Pourquoi t’avais besoin de faire croire que t’es morte ?! Quel objectif tu poursuis avec ça ?! Ils s’en foutent, ils savent pas qui t’es et ils n’ont aucun souvenir autres que le bloc, c’est quoi ton problème ?!

FIN DE ZONE SPOILER


Le film se conclut sur un énorme appel au spectateur. Une référence à la phase deux du plan qui résonne comme un « Venez voir la phase deux dans les salles à l’automne 2015 ! » La boucle est bouclée, aucune ambition artistique mais une stratégie commerciale bien rodée. Le concept était prometteur, mais Le Labyrinthe peine à convaincre. Par moment l’histoire semble devenir un simple prétexte pour montrer des monstres en images de synthèse et des décors monumentaux. Un film à peine divertissant.

mardi 21 octobre 2014

Horns ou Harry Potter avec des cornes

Salut tout le monde ! Comme vous avez pu le remarquer le calendrier cinéma est assez chargé en ce moment. On a eu un Noé puis Sin City : J’ai tué pour elle puis un Fincher (Gone Girl), un Aja (Horns), d’ici deux semaines Interstellar de Christopher Nolan sans parler du phénomène Xavier Dolan avec Mommy. Donc si vous ne savez pas quoi faire un soir, allez au ciné, vous n’avez que l’embarras du choix. Aujourd’hui, gros plan sur Horns d’Alexandre Aja.

Cocorico notre Alexandre Aja national sort un nouveau film. Un événement puisque la dernière production de l’un des réalisateurs français les plus cotés d’Hollywood c’était Piranha 3D sorti en 2010. 4 ans sans film donc mais Aja revient en 2014 avec Horns, une adaptation du roman éponyme de Joe Hill qui, accrochez-vous bien, n’est autre que le fils de Monsieur Stephen King. Même si on n’est pas certain que le talent soit héréditaire, écrire fils de Stephen King sur son CV ça a quand même de la gueule. Mais venons-en au fait. Alors en gros, Horns c’est l’histoire d’un mec dont la copine est assassinée dans la forêt. Mais tout le monde les a vus se disputer le soir même au vieux resto moisi du coin. De fait Daniel Radcliffe alias Ignatius Perrish, Ig ou Iggy pour les intimes et Harry Potter pour tout le reste de la planète, je m’égare là… Enfin bref Iggy est accusé du meurtre de sa très jolie copine incarnée par Juno Temple. Au passage c’est une actrice que j’adore pour son rôle d’Anna adolescente dans l’excellentissime Mr Nobody de Jaco Van Dormael, à voir absolument. Tout le monde le renie, la presse le harcèle, passez-moi l’expression mais c’est la merde ! Mais une nuit qu’il était complètement bourré et qu’il s’envoyait son amie d’enfance, des cornes lui poussent sur le front. A sa grande surprise ça ne semble choquer personne à part lui, par contre les gens commencent à être bizarrement francs et directs avec notre héros. Sa mère lui dit qu’elle voudrait qu’il soit mort et son père qu’ils n’ont jamais rien eu en commun, une bonne journée dans l’ensemble. Armé de ces cornes, Iggy décide donc de découvrir la vérité sur le meurtre de sa femme.
                Alors ce film a quelque chose de génial, cette petite touche de folie propre aux films d’Alexandre Aja. Quand je dis petite touche de folie c’est un euphémisme pour dire complètement barré. Vous savez, ce genre de film devant lequel on se dit « Mais… mais WTF !! » Parce qu’un monde où tout le monde serait super sincère c’est vraiment très étrange et très drôle à voir de l’extérieur, et ça donne quelques scènes complètement dingues. En cela Horns m’a rappelé Piranha 3D. L’ennui c’est qu’ici au lieu d’un film d’horreur rempli de bimbos c’est un drame fantastique qui se joue. Aussi ce double ton est-il parfois un peu dérangeant. Au-delà de ça le film est vraiment bon. Aja a déclaré en interview : « Je voulais que l'on retrouve […] cette dualité présente dans l'univers visuel, ce sentiment de réalisme âpre avec un côté un peu magique. » C’est exactement ce que donne le résultat final, un mélange assez perturbant entre une vision bien crade de l’Amérique profonde un peu comme dans The Wrestler (Darren Aronofsky) ou The place Beyond the Pines (Derek Cianfrance), et un univers onirique et verdoyant qui n’est pas sans rappeler des films comme Le Labyrinthe de Pan (Guillermo del Toro) ou Le Secret de Terabithia. Un contraste super intéressant qui figure assez bien le fossé entre l’ancienne et la nouvelle vie d’Ig Perrish. Deux univers visuels, deux tons et deux vies totalement différents, l’ensemble tient vraiment bien la route et on voit tout à fait où Aja veut en venir avec ce film. Alors évidemment, ça n’a pas la puissance d’un Fincher ou d’un Aronofsky mais avec Horns Aja revient à son meilleur niveau avec un univers vraiment à part comme à l’époque de Haute Tension. Globalement on peut dire que la réalisation est largement au niveau de mes attentes.
                L’histoire est elle aussi géniale car à faire révéler aux gens ce qu’ils s’efforcent de cacher depuis des années, on en apprend beaucoup sur la nature humaine. L’envie, la jalousie, les mensonges, la vengeance et surtout la part d’ombre que l’on cache tous en nous. Le final est poignant ce qui est à la fois une bonne et une mauvaise chose car à mon sens, c’est ce contraste entre un film complètement barré et un drame ultra prenant qui pose problème. En sortant de la salle, je ne savais pas trop quoi penser du film. J’ai pris beaucoup de plaisir à le voir mais après, une fois que j’ai eu une vue d’ensemble, difficile de me faire un vrai avis tant j’avais l’impression d’avoir vu deux très bons films qui n’avaient rien en commun à part leur histoire, ce qui fut assez déroutant.
                Pour ce qui est du reste, la bande son est super cool avec de grands classiques comme David Bowie ou The Pixies, quant au casting, il l’est tout autant car outre Daniel Radcliffe et Juno Temple dont j’ai déjà parlé, on y retrouve Max Minghella (The Social Networt) ou encore James Remar (Dexter).


Voilà, je crois qu’on a fait le tour de la question. Pour résumer, Horns est un bon film. Un film qui mérite d’être vu mais qui en déroutera plus d’un tant il mélange deux genres que tout oppose. Un film poignant et drôle en même temps, mais qui donne une vision assez péjorative de l’être humain et de sa propension à faire le bien ou le mal. Attention tout de même, le film est interdit aux moins de 12 ans et compte quelques scènes assez gores.

dimanche 19 octobre 2014

Gone Girl : Super Fincher est de retour

Un Fincher qui sort c'est toujours un événement pour moi. Parce qu'il faut bien le dire, après bientôt 30 ans de carrière et une dizaine de longs métrages, les déceptions ont été rares. Et ce n'est pas avec Gone Girl que les choses vont changer. Parce que c'est pour ce genre de film que j'aime le cinéma. En réalité le moment que je préfère c'est la sortie de la salle. Je sors de ma torpeur et je commence à réfléchir en marchant. C'est à ce moment là que je me rends réellement compte de la qualité de l'œuvre (œuvre est parfois un bien grand mot) que je viens de voir. Et un grand film, c'est un film qui ne vous laisse pas sortir de la salle comme vous y êtes entré. Un grand film ça marque, ça choque, ça émeut, ça fait réfléchir… Et c'est bien pour ce genre de film que j'aime le cinéma. Et là avec Gone Girl, Fincher nous offre encore une fois un film démontrant son talent.

                Mais par où commencer ? Eh bien par le début, c'est ce qui me parait le plus logique. Comme à son habitude, le réalisateur américain donne le ton dès le générique. J'invite tous ceux qui ne voient pas de quoi je parle à revoir le générique de Fight Club, ou à voir le film en entier si, par un incommensurable malheur ce n'est déjà fait. Retour à Gone Gril, alors que les noms des acteurs et des principaux membres de l'équipe technique défilent, je suis déjà subjugué par la beauté de l'image. La lumière est juste exceptionnelle, comme toujours. Je dis comme toujours parce que c'est grâce à Fincher que j'ai compris à quoi ça servait d'éclairer un film et le rôle majeur que ça pouvait avoir sur ce que ressent le spectateur. C'était devant Seven, je m'en souviens comme si c'était hier. L'éclairage c'est super important parce que ça donne un "ton" à l'image. Comme une chanson en majeur paraîtra plus joyeuse qu'une chanson écrite en mineur (je schématise, je ne suis plus trop calé solfège), un film peut paraître oppressant, onirique, triste… et ce juste grâce au cadre et à la lumière. Et il y a justement un mec qui est chargé de superviser ça, le directeur de la photographie. C'est lui qui est chargé de transformer des gens qui bougent et qui parlent devant une caméra en une image qui retranscrit la vision du réalisateur. Fin de la parenthèse technique. Je disais donc, dès le générique de Gone Girl, on sent la maîtrise d'un grand réalisateur. Précisons d'ailleurs que c'est  Jeff Cronenweth qui assure la direction de la photo sur Gone Girl, tout comme sur Millenium, The Social Network ou encore Fight Club.
                L'écriture est aussi d'une grande qualité, mais c'est à un auteur ou plutôt à une auteur qu'on le doit, Gillian Flynn qui a transposé son propre best-seller en scénario. Et elle l'a fait avec brio. L'histoire bien que non linéaire est limpide et la lecture du journal intime d'Amy apporte tour à tour éclairages puis doutes sur les événements.

ATTENTION SPOILER

Et quand je parle de doutes et d'éclairages, je veux bien sûr parler de l'image qu'on se fait du mariage de Nick et Amy cette dernière passant de femme épanouie, à victime de violence puis à garce manipulatrice sans cœur jusqu'à nous apparaitre comme totalement folle à lier. J'aurais d'ailleurs renommé le film : "Pourquoi ne jamais se marier avec une femme plus intelligente que soi." Je fus relativement étonné de découvrir, en préparant cette critique, que le scénario avait été écrit par une femme. Parce que globalement dans ce film les rôles féminin sont plutôt négatifs. Amy est l'odieuse garce que l'on sait, la maitresse de Nick ne semble pas avoir beaucoup de scrupules à coucher avec un homme marié (et son credo c'est même "Gicle-moi dessus" si on en croit Amy). Même l'officier Boney qui est l'agent chargée de l'enquête bien que relativement intègre est incompétente. Il n'y a bien que Margo, la jumelle de Nick pour rattraper la condition féminine dans tout ça. D'un autre côté nous avons aussi les sombres idiots, comme l'assistant flic (enfin il seconde Boney quoi) ou l'amour de lycée d'Amy, qui ne peuvent imaginer une femme qu'en victime sans se douter une seconde qu'elle puisse être garce et manipulatrice. Enfin bref, Gone Girl n'est pas sympa à l'encontre des hommes, des femmes mais surtout des relations qu'ils entretiennent.

FIN DU SPOILER

Avant de conclure je voudrais vous parler un peu du casting. Ben Affleck, un acteur et un réalisateur dont j'aime beaucoup le travail, a choisi de repousser la réalisation d'un nouveau film pour tourner avec Fincher. Un réalisateur qui repousse son propre projet pour se mettre au service de celui d'un autre en temps qu'acteur, c'est quand même pas rien (même si Ben Affleck est au moins autant acteur que réalisateur). Le problème fut, semble-t-il, beaucoup plus épineux en ce qui concerne le rôle d'Amy Dunne. En effet, de nombreuses actrices ont été évoquées dont Nathalie Portman, Charlize Theron (qui aurait été vraiment super dans ce rôle selon moi) ou encore Olivia Wilde. Mais finalement Rosamund Pike s'est montré tout à fait à la hauteur du rôle clé du film.


Finalement, Gone Girl c'était trop cool ! Beau visuellement, parlant sur le plan émotionnel, et même drôle parfois grâce à quelques bonnes répliques et touches d'ironie très bien placées. Bref un très bon film. Et le public ne s'y est pas trompé puisque dès sa première semaine d'exploitation, le film avait déjà réalisé plus de 500 000 entrées ce qui le plaçait alors en tête du box-office français.

lundi 13 octobre 2014

Annabelle : On aurait mieux fait de t'offrir une Barbie !

Quel ne fut pas mon étonnement quand j'ai vu la foule massée devant la salle 12 du Pathé Vaise. Une salle archicomble pour un film d'horreur, étonnant ! Certes nous somme en première semaine d'exploitation mais c'est tout de même la première fois que je vois une salle aussi pleine pour un film de genre. Même le premier Paranormal Activity n'avait pas rassemblé autant de monde. Ceci dit, l'énorme campagne de communication mise en œuvre par la Warner explique sans doute cet étrange phénomène. Enfin bref, la salle s'ouvre enfin je m'installe, les lumières s'éteignent et c'est parti.
Petit rappel du contexte: Annabelle de John R. Leonetti est un spin-off de Conjuring de James Wan sortie l'an dernier. James Wan a qui on doit entre autres Insidious et le premier volet de la saga Saw. Donc voilà, James Wan c'est du lourd et du coup je m'attendais à ce qu'Annabelle ça le soit aussi et je n'ai pas été déçu. On retrouve tout ce qui avait fait la qualité de Conjuring, l'éclairage, l'ambiance oppressante, la musique grinçante, et l'entité démoniaque qu'on aperçoit furtivement lorsqu'elle sort de l'ombre. Alors globalement le film est propre, c'est soigné, c'est efficace et bien rythmé mais sans en faire trop ce qui est très important parce que quand on veut trop en faire dans le cinéma d'horreur on finit vite par faire du Scary Movie, ce qui n'est pas le but recherché au départ. Mais ici ça va, la musique soutient parfaitement les moments de tension, les images sont belles, les jumps scare sont bons et surtout utilisés à bon escient, certaines scènes vous laissent même littéralement collé au siège. Un bon moment donc, 1h38 de frissons, il fallait tout de même souligner ce bon point.
Oui mais voilà (parce qu'il faut toujours qu'il y ait un "oui mais" dans une critique), à force de faire exactement ce qu'on attend de lui, Leonetti cesse de nous surprendre. Annabelle est un bon film d'horreur, aucun souci là-dessus mais pour l'innovation et l'originalité il faudra repasser. Le film tombe assez vite dans la facilité en reprenant la trame universelle du film d'horreur:
1.    Grosse catastrophe traumatisante (le meurtre des voisins)
2.    Retour au calme et premières manifestations étranges
3.    Ah là ça devient carrément flippant et personne veut me croire
4.    Ok pas grave je vais aller faire mes propres recherches
5.    Ah ok c'est donc un truc super méchant qui me veut vraiment du mal
6.    Ca y est les gens me croient mais c'est trop tard tout part en c***
7.    Ouf finalement on s'en sort plutôt pas mal même s'il y a eu deux ou trois morts
Pièce à conviction suivante, l'accumulation d'éléments clichés du cinéma d'horreur comme les prêtres, les poupées, les démons, les sectes, les sataniques en chemise de nuit, les dessins au sang sur les murs et j'en passe. En fait ce film c'est un peu comme un mec qui fait trop de zèle, au début on le trouve cool puis au bout d'un moment ça devient un peu chiant.
Alors vous allez me dire que je suis dur, que de toute façon il n'y a pas des milliers de manières de faire de l'épouvante et qu'on tourne toujours autour des mêmes thèmes et des mêmes ressorts narratifs. Alors oui, je suis d'accord, et j'y ai pensé quand j'ai écrit tout ce qui était au dessus. Le problème c'est que l'ombre de James Wan plane sur le film, par moment j'ai cru voir du Insidious ou du Cojuring et c'est encore plus frappant quand on sait que James Wan est producteur sur Annabelle. Mais malheureusement comme à chaque fois que Wan invente un univers avant de le laisser à quelqu'un d'autre pour une suite, un préquel ou un spin-off, le premier est toujours le meilleur, mais les films suivants sont rarement très mauvais. Je m'explique, personne ne fera jamais du James Wan comme James Wan, par contre imiter James Wan c'est facile et ça donne un film tout à fait potable (c'est ce qui se passe pour une grande partie de la saga Saw). Car quand on y regarde de plus près, Wan a réalisé trois des meilleurs films d'épouvante de ces 10 dernières années: Saw, Insidious et Conjuring. C'est mon avis mais aussi celui d'Allociné, ce qui lui donne tout de suite beaucoup plus de crédibilité. Sur ces trois films aucune moyenne ne tombe en dessous de 3/5 que ce soit côté spectateurs ou critiques. Donc voilà, James Wan est très bon et un cinéaste qui s'en inspire a de grande chance de faire un film d'horreur potable. Quand je dis potable c'est parfois tout juste potable mais bon, il y a tellement de daube dans le cinéma de genre qu'un film potable c'est déjà ça.

Au final ce que je reproche à Leonetti sur Annabelle c'est d'avoir choisi la facilité en reprenant les recettes qui avaient marché dans Conjuring. Mais finalement si le film est bon, et vu les hurlements dans la salle il l'était, de quoi je me plains moi.